LA COALITION POUR LE DIALOGUE SUR L’AFRIQUE (CoDA) 2009
Aide-Mémoire / Note de discussion
Dr. Yves Ekoué AMAÏZO
Expert en architecture financière
Préparée pour la Conférence CoDA, Tunis, 28 Novembre 2009
L’une des quatre priorités de CoDA « Réponses africaines à la crise financière mondiale »
RESUME *
La Coalition pour le Dialogue sur l’Afrique (CoDA) propose une lecture alternative des réponses à apporter aux conséquences en Afrique de la crise financière de 2008. Le paradigme de dépendance économique et financière ne suffit plus pour expliquer la complexité d’une crise systémique touchant les nations africaines. Rupture avec l’économie palliative, rejet d’une Afrique conçue comme la variable d’ajustement pour les économies postindustrielles, vigilance à l’égard du piège contenu dans le concept de « réduction de la pauvreté » qui n’est pas du tout synonyme de création de richesse partagée, neutralisation des solutions toutes faites ou dites « universelles », etc. Tels sont les préalables.
Mais que proposer face à la désarticulation avancée de l’économie africaine qui peine à organiser son unité monétaire, voie privilégiée pour retrouver sa souveraineté monétaire ?
Les réponses suggérées sont modulables, reposent sur des contre-pouvoirs et passent par un pacte africain de soutien au pouvoir d’achat et à la création de la prospérité économique. L’Afrique doit retrouver les mécanismes d’anticipation afin de limiter les arbitrages stratégiques allant à l’encontre de ses propres intérêts.
*Prière se référer aussi au Document de politique générale (Rapport principal).
1. INTRODUCTION : QUELLE ECONOMIE POUR L’AFRIQUE DE L’APRES-CRISE 2008 ?
La crise financière de 2008 a réveillé de vieux débats entre la priorité qu’il faut accorder à l’individu et celle qui revient à la communauté. Lorsque les concepts de « développement durable » ou « développement soutenable » s’inscrivent dans une approche du moyen et du long terme, l’équilibre entre l’intérêt personnel et le bien commun se fait grâce à la régulation. Depuis au moins quatre décennies, cette régulation a été mise en cause par un dogmatisme aveugle dans la foi dans un marché qui se régulerait automatiquement. La crise financière en conduisant, par son ampleur et sa rapidité de propagation, à un démenti formel de cette croyance, a permis de rappeler le rôle bénéfique de l’interventionnisme de l’Etat, ce qui n’est pas un nouveau rôle pour ce dernier.
Les gouvernements des 20 pays les plus riches (G 20) ont engagé des montants considérables dans le sauvetage d’institutions financières et d’entreprises de production qui avaient privilégié leur intérêt personnel de recherche effrénée du profit sans relation avec l’économie réelle, mettant en difficulté l’ensemble de l’architecture financière et économique mondiale. Le lien ancestral avec l’économie de production et le manque d’infrastructures monétaires et financières ont finalement contribué à sauver l’Afrique en l’empêchant de rentrer dans les sphères de la turbulence financière et économique. Les conséquences sociales n’ont pas encore fini d’émerger, avec les successions de gâchis au plan humain.
Ce rapport a pour objet d’interpeller les Africains en les invitant à offrir des voies alternatives et constructives de sortie de crise ainsi que des approches contractuelles de mise en œuvre opérationnelle et en synergie pour organiser la prospérité économique. Les querelles intestines devront alors rester aux vestiaires des antiquités de la préhistoire. L’avenir économique de l’Afrique mérite ce détour car il s’agit de remodeler l’économie africaine de l’après crise financière de 2008 et de la décade 2010-2020.
2. Origines et conséquences de la crise sur l’Afrique
Dans le cadre plus large de la dérégulation des marchés financiers et du laxisme dans les contrôles et l’interventionnisme de l’Etat depuis plus d’une décennie, on a graduellement assisté à la création de produits financiers de plus en plus sophistiqués et de moins en moins sécurisés, voire sans lien aucun avec l’économie réelle et la production. C’est paradoxalement dans ce mouvement des années 2005-08 que sur le marché des prêts immobiliers aux Etats-Unis, des agents d’intermédiations financières ont pu exploiter le vide juridique établi consistant à reporter leur responsabilité d’intermédiaire financier sur les clients. Cette déresponsabilisation dans la chaîne des responsabilités dans l’octroi de crédit s’est amplifiée grâce aux possibilités de primes exceptionnelles pour l’intermédiaire, le risque étant totalement reporté sur le preneur de crédit. C’est ainsi que contre tout respect des règles prudentielles bancaires qui veulent qu’un client ne peut s’endetter en moyenne au-dessus de 33% de ses revenus, et face à un marché immobilier en pleine expansion faisant espérer des gains extraordinaires dans un futur proche, que de nombreux agents représentants des intermédiaires financiers ont accordé sur le marché hypothécaire des crédits à des clients en réalité insolvables.
Par ailleurs, la possibilité a été donnée aux intermédiaires d’octroyer des crédits avec des taux d’intérêts extrêmement faibles avec parfois des délais de grâce de quelques années pour ensuite imposer des taux extrêmement élevés pour les remboursements alors que les salaires ne suivaient pas. Le défaillance des ménages en s’est pas fait attendre et s’est rapidement propagée, bloquant ainsi les possibilités de réalisation des hypothèques. Lorsqu’il y a eu un retournement de tendance et que les agents économiques notamment les ménages se sont révélés insolvables, les défauts de paiements se sont multipliés et ont conduit rapidement à une crise du crédit, rapidement transformées en crise de confiance entre les intermédiaires financiers qui cherchaient à se débarrasser sur leurs voisins des créances douteuses devenues irrécouvrables.
Un phénomène similaire fut observé sur les marchés des produits dérivés sauf que les agents économiques n’étaient plus des ménages mais bien des institutions financières, des entreprises, des spéculateurs et des investisseurs institutionnels (fonds de pension, assurance, Etat, etc.). C’est ainsi que face à un retournement de conjoncture, des Etats comme l’Islande[1] se sont retrouvés en banqueroute, et de nombreuses sociétés en faillite. Aux Etats-Unis comme ailleurs en Europe, c’est l’Etat qui est venu à la rescousse en tentant d’honorer les engagements pour que le système financier tout en entier ne s’écroule pas dès le 3e trimestre 2008. En réalité, les pays du G20 ont surtout accepté de mettre entre parenthèse un certain nombre d’actifs toxiques, en renflouant à partir d’engagement et garanties de l’Etat le système financier afin d’arrêter la perte de confiance généralisée qui s’en est suivie entre les institutions financières.
Il y a donc eu une nationalisation concertée avec une réduction simultanée des taux d’intérêt des principales banques centrales (Federal Reserve des Etats-Unis (Fed) et Banque centrale européenne (BCE)). Rapidement et face à un assèchement du crédit, les conséquences de la crise financière sur l’économie ne se sont pas faites attendre. Outre, les destructions d’emplois sans créations nouvelles correspondantes, la contraction vertigineuse du secteur productif, la baisse de la demande internationale par les pays riches industrialisés, ce sont les effets induits, indirects et les externalités négatives étalées dans le temps qui semblent être le lot quotidien du continent africain.
Ce qu’il convient de noter est qu’avec une croissance de la production industrielle de pays émergents et des pays en développement qui atteignait près de 12 % en moyenne tous les trimestres en l’an 2000, avec un plafond de 15 % au premier trimestre de 2004, l’indicateur de la production industrielle a enregistré en 2008 une contraction successive pendant trois trimestres consécutifs pour atteindre -12 % au troisième trimestre 2008 (IMF, 2009c : 2).
Il faut donc rappeler que les pays industrialisés avaient une croissance de la production industrielle de près de 6 % en 2000, inférieure à la moyenne mondiale (près de 8 %). La crise financière de 2008 a fait chuter les pays industrialisés, les pays émergents et en développement.
Au troisième trimestre de 2008, la moyenne mondiale est tombée à -12 % de la production industrielle (Graphique 2). Il est donc fondamental de promouvoir les structures productives africaines tant au niveau des capacités (institutions et environnement d’appui aux affaires) que des capabilités (valeur ajoutée, technologie et connaissance). Les créations d’emplois ne sont pas venues remplacer les destructions d’emplois consécutives à la crise financière.
En l’absence d’un secteur industriel diversifié et créateur de richesse, l’Afrique a tiré sa croissance économique entre 2000 et 2007 d’une demande forte pour ses matières premières non transformées et plus particulièrement le pétrole et les minerais, des produits recherchés particulièrement par les pays industrialisés et de plus en plus par les pays émergents comme la Chine[2] et l’Inde (Arieff, Weiss & Jones, 2009 : p. 3). En parallèle, les flux net de capitaux privés ont quadruplé entre 2000 et 2008 alors qu’entre 1960 et 2000, ces flux étaient quasiment en stagnation[3].
L’Asie et de nombreux pays du Golfe se sont retrouvés avec un niveau d’épargne très élevé. Cela a eu pour conséquence de soutenir indirectement la consommation dans les pays industrialisés et notamment aux Etats-Unis. La perception à l’époque était que l’acquisition d’actifs en dollar et garantie par les Etats-Unis était réputée moins risquée et plus liquide. La crise et la perte de confiance dans les échanges interbancaires et le niveau élevé de l’endettement budgétaire des Etats-Unis ont conduit à ouvrir la perspective d’une sortie massive possible des capitaux des Etats-Unis, sans compter les possibilités de décisions unilatérales de dévaluation du dollar américain. Ce n’est pourtant pas de ce côté que la crise s’est développée. Ce sont principalement les structures complexes de produits financiers dérivés reposant sur une économie virtuelle qui a semé la panique du défaut de paiement. Pour clore le tout, l’asymétrie importante entre l’Asie et les pays industrialisés a réduit les marges de manœuvre des pays industrialisés. Ces derniers ont donc du réduire leur demande puisque le coût du crédit s’était relevé. C’est à ce moment que les prix sur le marché de l’immobilier et la valeur des hypothèques ont chuté avec les répercussions en cascade. La réponse a été une injection massive des Etats y compris pour des institutions du secteur financier, de l’assurance et de la production avec des estimations autour de 30 % du produit mondial brut[4].
Rien n’est donc sûr quant à un retour de la méfiance interbancaire si la gestion des actifs toxiques réapparait à un moment donné au cours de la période de reprise économique. Les tendances protectionnistes de nombreux Etats n’ont pas contribué à améliorer la reprise notamment pour les pays faiblement industrialisés, et disposant d’une faible influence économique (United Nations, 2009a).
3. La crise affecte différemment les régions et pays d’Afrique
Il n’est plus possible d’apporter des solutions standardisées en guise de réponses aux conséquences de la crise financière en Afrique. En effet, les différentiations régionales sont palpables. Les attributs économiques et financiers qui fondent une souveraineté économique des Etats conduisent à des positionnements ciblés. Cela peut paraître intéressant pour les pays exportateurs d’hydrocarbures. Mais, cela ne doit pas empêcher les Africains d’identifier les repères communs sur lesquels ils peuvent bâtir des stratégies à moyen-terme et offrir des solutions en urgence aux populations directement affectées.
La crise touche plus gravement les femmes et les jeunes et aucune mesure particulière ciblée n’a semble-t-il été prise pour prendre en compte cette différentiation notable au niveau des agents économiques pris individuellement.
Cette crise financière a quelque chose de particulier qu’elle affecte directement et parfois avec un décalage les pays qui sont les plus intégrés à l’économie mondiale. Ces canaux de transmission sont donc bien la dépendance vis-à-vis du système mondial tant au plan financier, du commerce que des transferts divers. C’est aussi cela qui rend difficile les réponses et solutions standardisées. Pour les pays africains, c’est bien le surplus du commerce, les flux des capitaux privés y compris les transferts de fonds de la Diaspora, les manque-à-gagner liés à la fiscalité déclinante du fait d’entreprises en faillite ou des assèchements sur le marché du crédit. Il s’agit donc de conséquences multiples.
En réalité, la crise « frappe » selon la structure de l’économie. C’est ainsi qu’en référence au solde extérieur courant y compris avec les dons, la situation de l’Afrique subsaharienne s’est dégradée en 2009 en passant à -2,1 % du PIB, reflétant la morosité généralisée de cette région et rappelant tristement les résultats de la période 1997-2002, avec -2,5 %. Mais ce sont les pays enclavés ou côtiers sans ressources particulières ou sans diversification qui subissent le plus fort contrecoup (voir Graphique 3).
Les pays pétroliers, malgré une chute significative sont résilients alors que les économies non pétrolières perdent l’essentiel de leur marge de manœuvre budgétaire. Les manques à gagner au niveau de la fiscalité des Etats ouvrent le champ à des nouveaux arbitrages dans la contrainte (Berg et Al., 2009). Ce sont ces contraintes qui risquent de déterminer les orientations stratégiques pour la décade 2010-2020 en Afrique. Il y a donc lieu de résister à la propension à ne parer qu’aux problèmes de court terme souvent limités aux considérations nationales et prendre en considération les approches régionales et continentales et les besoins de subsidiarité dans les transferts de pouvoir qui ne manqueront pas de se faire sentir. Toutes approches nationales ne s’inscrivant pas dans une logique d’intégration régionale ou continentale se révèle être contre-productif sur tous les plans, notamment économique, social que politique.
La situation n’est pas meilleure lorsque l’analyse se fait au niveau des régions (voir Graphique 4). Alors que la moyenne des années 1997-2002 témoignait d’une certaine convergence, les écarts sont allés grandissants entre les sous-régions africaines dans la période pré-crise (2007). Avec la crise de 2008, aucune région ne témoigne pour le moment d’une certaine résilience. Au niveau de la structure économique, seules les économies pétrolières semblent résister malgré la volatilité importante liée à la variation du prix international des produits hydrocarbures.
La crise financière de 2008, dont la responsabilité n’incombe pas à l’Afrique, a fait replonger le continent à des performances médiocres et risquent de faire perdre les efforts de gouvernance et de responsabilité économique accomplies durant les dernières années. Il y a donc lieu de condamner les donneurs de leçon sur la propension du marché à réguler l’économie surtout lorsque les garde-fous ont été livrés sur l’échafaud de la dérégulation.
4. La faillite du marché régulateur
L’Afrique est la région du monde où les progrès significatifs pour atteindre les objectifs du millénaire du développement des Nations Unies (OMD) sont les plus lents (Arieff, Weiss & Jones, 2009 : 4) quant ils ne sont pas insignifiants (Easterly, 2009) ou palliatifs (Reinert, 2008) notamment en termes de renforcement des capacités productives. La croissance économique de l’Afrique exprimée en changement annuel du PIB réel de la période avant crise était de 6 % en moyenne entre 2005-07 (IMF, 2009b : 169) alors que pour la même période la croissance de la valeur ajoutée manufacturière n’a pas dépassé 3,4 % (UNIDO, 2009 : 45). Outre le déficit de croissance, c’est l’absence de priorité accordée par les Nations-Unies dans l’OMD pour les capacités productives et le déni d’intérêt pour l’industrialisation par les Etats africains qui posent problème. Il n’y a que peu de chance de penser en termes de régulation économique si le secteur de la production n’est pas remis au centre de l’Agenda du développement, ou tout au moins celui de l’Afrique.
La notion de régulation en Afrique est souvent attachée au rôle de l’Etat. Mais en réalité, chaque étape du mode de production est marquée par de nouveaux modes de régulation, c’est à dire une forme spécifique de ponction, d’accumulation et de répartition entre les agents économiques. Ce mode de régulation ne change pas par fatalité mais constitue bien la résultante d’un processus dynamique d’adaptation de la production, de la demande économique et sociale, les conjonctions d’ajustements économiques et sociaux répondant à des contrepoids institutionnalisés ou pas dans les rapports sociaux, enfin et non le moindre, les comportements sociaux et les mentalités. Il est donc bien question de retourner à un état d’équilibre changeant compte tenu du contexte imprévisible, changeant. La compétition entre les agents économiques tend à favoriser les agents disposant de plus d’influence, au point où certains d’entre eux peuvent, par le biais d’une organisation et de groupe de pressions, influencer le mode de régulation.
Au plan économique, le mode de régulation en Afrique tend à dépendre principalement de l’Etat et des forces économiques qui lui sont associées. Il y a rarement l’association des agents économiques au processus afin de favoriser des régulations où l’adhésion constitue le droit commun. Aussi, l’intensité de la concurrence au niveau local ou sous-régional, la fixation des salaires et leur évolution, la fixation des prix, la fixation de la monnaie, le niveau de concentration des structures productives et le type de division internationale du travail et tous les points d’entrée choisis pour participer à l’intégration économique mondiale, sont souvent subis par les Etats africains et à fortiori par les populations. D’après les grands préceptes de l’économie néolibérale et de la « main invisible », c’est la régulation concurrentielle qui est privilégiée avec une grande flexibilité sur les prix, la monnaie et une faible intervention de l’Etat. Mais la sévère crise de 1929 est venu stopper nette cette foi en une régulation automatique du marché. C’est donc le même phénomène que la crise de 2008 tend à rappeler aux doctrinaires de l’économie néolibérale.
Au niveau de la production, c’est le modèle du « fordisme » basé sur l’accumulation intensive, une production de masse, une standardisation des chaînes de production avec pour objectif les économies d’échelle, une redistribution des gains de productivité pour assurer un pouvoir d’achat au salarié, une consommation de masse, l’intervention de l’Etat pour de meilleurs transferts sociaux vers la sécurité sociale, l’intervention des syndicats pour un pouvoir d’achat soutenu… Ce système suppose un équilibre et une volonté de régulation qui ne privilégie pas certains agents économiques au profit d’autres et un Etat qui ne fait pas le choix de soutenir les agents économiques les plus influents. C’est ainsi qu’après la crise de 1929 et la 2e guerre mondiale, des années d’une certaine stabilité ont pu faire croire que le principe de la régulation était définitivement acquis. Mais entre 1970 et 2000, c’est le principe de la « dérégulation » qui a graduellement été promu et a occasionné de nombreuses crises financières intervenant de manière de plus en plus rapprochée et concernant de plus en plus de pays (Reinhart & Rogoff, 2008). L’absence de régulation et d’anticipation a un coût.
Les crises systémiques de la finance ont un coût. Sans compter les prêts irrécouvrables non inscrits dans les bilans, ces crises ont fait perdre entre 1998-91 plus de 24 % du PIB à la Côte d’Ivoire et plus de 54 % à l’Indonésie entre 1997-2002 (Caprio & Klingebiel, 2003). La dérégulation a eu un autre effet peu ressenti en Afrique, c’est l’accroissement de 1 à 9 en moyenne de la valeur sur le marché des produits dérivés entre 2000-08 avec l’envolée des contrats virtuels ne reposant en rien sur la production mais liés aux variations de taux d’intérêts[5]. Selon le Département du Commerce des Etats-Unis, le profit moyen avant impôts entre 2000-06 s’élevait à 29 % en moyenne (World Bank, 2009b : p. 8).
Les banques américaines, qui n’étaient pas soumises à la même rigueur des règles prudentielles comptables, ont pu ainsi financer des engagements à long terme risqués et non-liquides par des engagements à court-terme à partir d’instruments financiers innovants. Sans couverture sous forme de garantie et d’assurance, les banques d’investissements n’ont pas anticipé la crise alors que les investisseurs ont graduellement perdu confiance dans des produits financiers souvent adossés à un marché hypothécaire précaire. Incapable de réduire l’augmentation des risques, de limiter les graves faiblesses et la faillite des agences de notation dont les plus grandes continuaient à distribuer des notations de type AAA alors que de nombreuses institutions financières étaient manifestement non solvables, la dérégulation a empêché le contrôle et l’anticipation créant ainsi une crise de confiance, une crise de liquidité, et une crise de solvabilité[6].
Cette crise systémique n’a pas manqué d’avoir des effets décalés sur le niveau de demande des biens africains. Il est devenu évident qu’un Etat, fusse-t-il le plus puissant, ne peut plus réguler un système financier dont les acteurs sont pour l’essentiel globaux. Il faut donc en tirer une leçon pour l’Afrique qui continue à tenter de résoudre les problèmes financiers africains, dont la crise financière, au niveau national.
Le marché a besoin d’un système de concurrence et de contre-pouvoir pour être efficace. La régulation sans l’Etat ou avec un Etat faible ou affaibli est une erreur économique. Les conséquences sont des horreurs économiques dont témoigne la croissance du PIB par habitant de l’Afrique subsaharienne en 2009 tombé en dessous de zéro depuis plus de 20 ans avec ‑0,9 % (IMF, 2009a : p. 64, voir (Graphique 5). La régulation par le marché tend à favoriser en Afrique un système patrimonial qui privilégie commerce, spéculation sans redistribution mais surtout neutralise complètement les structures productives de l’Afrique et donc la réalité de la création pérenne de la richesse partagée et de l’emploi décent correspondant.
Les actions urgentes sont indispensables au niveau africain comme au plan international. L’objectif est d’offrir un financement stable, prévisible et déconnecté du système virtuel sans lien avec l’économie réelle. Ce contrôle de la volatilité macro-économique du marché ne se justifie que par la volonté d’aller vers une utilité sociale. Il n’y a donc pas d’autres alternatives que la régulation des marchés financiers. Cela suppose des mesures énergiques pour les autorités monétaires de contrôle, une régulation des fonds spéculatifs et plus particulièrement le réseaux de fonds d’investissements privés, de nouvelles règles pour vérifier les « affirmations » des agences de notation, des mesures énergétiques pour mettre fin aux paradis fiscaux en Afrique, lieu privilégié de l’évasion fiscale et du blanchiment d’argent, de nouvelles normes de recapitalisation des institutions financières sans pénaliser les petits opérateurs et une refonte du système de bonus et de rémunération qui doivent donner la priorité aux performances à moyen- et long-terme en relation avec l’économie réelle.
Au niveau de l’Etat, il y a lieu aussi de protéger mieux les consommateurs de crédit des prêts usuraires et des ventes abusives de produits financiers, surtout si le risque n’est pas partagé par le vendeur du crédit. Il est au fond question de s’assurer que l’essentiel des coûts de réajustement du marché financier mondial soit réellement porté par ceux qui ont contribué à cette situation. La démocratisation du système devient un impératif avec des ouvertures pour que le dialogue social et l’implication des représentants d’agents économiques subissant les externalités des conséquences de la crise financière soient prises en compte. Le principe de la taxe sur les transactions financières en Afrique ne peut être éludé ainsi qu’une plus grande pénalisation des collusions d’actions entre les sociétés financières et les agences de notation par exemple.
5. Commerce et spéculation sans redistribution
Lorsque l’on se penche sur la structure des exportations et importations de l’Afrique en référence aux biens et services échangés avec le monde, il y a une asymétrie qu’il y a lieu de corriger pour fonder une politique de création équilibrée d’une prospérité économique. Le continent concentre ses échanges sur l’Amérique du Nord avec 21,7 % du total de ses exportations en 2007, 39,5 % avec l’Europe (de l’ouest), 19,1 % avec l’Asie et seulement 9,1 % avec l’Afrique (WTO, 2008a : 9). Par ailleurs, l’Afrique importe massivement des produits manufacturiers et ne s’organise pas collectivement en termes de stratégie pour en produire. Au total, la croissance des exportations africaines de biens en 2008 n’a progressé que de 3 % alors que celle des importations était de 13 % (WTO, 2009 : 6). Ce déficit de croissance n’est pas lié directement à la crise puisqu’il n’a fait que se creuser depuis 2006. En termes de part dans le commerce mondial de marchandises en 2008, la valeur des échanges africaines ne dépasse pas 3,55 % de la part mondiale alors que l’Amérique du sud et centrale s’élevait à 3,81 %, le Moyen-Orient à 6,64 % l’Asie à 27,6 %, l’Amérique du nord à 12,98 % et l’Union européenne à 37,48 % (WTO, 2009 : 13). En comparaison, l’Amérique centrale et du sud avait substantiellement augmenté son commerce intrarégional avec 24,4 % en 2007 contre 9,5 % pour l’Afrique (WTO, 2008 : 10). Il y a donc en Afrique, outre les problèmes classiques de limitation des échanges liés aux coûts de transaction, un véritable problème de capacités et de capabilités dans le secteur de la production de biens à valeur ajoutée. La crise ne peut donc pas servir d’excuses à des choix et arbitrages économiques qui ont négligé le développement des structures productives en Afrique.
Le paradoxe est que le besoin en matières premières non transformées a donné l’illusion d’un développement sans prospérité partagée en Afrique avec des taux de croissance du PIB qui ne reflétait pas la réalité du dysfonctionnement en termes de capacité à créer de la richesse de manière pérenne. Malgré la croissance faible des pays industrialisés et maintenant la crise financière de 2008 qui semble terminer le cycle de la dérégulation comme mode de création de la prospérité économique, il y a lieu de confirmer que ce sont bien les pays émergents et les pays en développement y compris l’Afrique qui ont soutenu la croissance mondiale depuis les années 1990 (IMF, 2009b, voir Graphique 6). L’Afrique est en train de passer d’un statut de variable d’ajustement à celui d’un partenaire vulnérable, mais incontournable. Elle soutient la croissance mondiale depuis les années 1990 sans d’ailleurs en tirer les avantages au plan de l’influence au niveau mondial. (Graphique 7). Ce sont donc bien les orientations économiques et les arbitrages stratégiques qui vont se faire au cours de cette période post-crise 2008 qui détermineront l’amélioration ou pas de l’autonomie économique de l’Afrique dans les années à venir. Ce qu’il convient d’éviter est le contrôle total ou partiel sur les politiques de développement des pays africains par la soumission aux conditionnalités de prêts accordés à des régimes manquants souvent de légitimité. Il y a bien lieu de parler de « piège des institutions financières internationales (Mbaye, 2009 : 30).
Les pays industrialisés ont choisi de créer de la richesse à partir d’un système de dérégulation qui a promu la spéculation et une croissance sans création d’emplois ou alors dans le cadre de la délocalisation, de nombreux emplois précaires, détruisant d’ailleurs tous les avantages acquis pour un travail stable décent au cours d’une vie professionnelle. C’est donc en évitant de tomber dans ce piège que l’Afrique devra arrimer ses futurs arbitrages économiques.
Ces choix ne pourront plus se faire en vase clos ou sur télécommande en référence aux injonctions venues des pays disposant d’influence et utilisant les canaux du multilatéralisme ou celui du bilatéralisme. Ce choix devront se faire avec des formes institutionnalisées de la participation des agents économiques, organisées et adhérant à de nouveaux concepts hérités des pratiques ancestrales donnant toute la priorité à l’humain et à la cohésion sociale. Il s’agit d’inventer et d’adapter le concept de solidarisme contractuel (Grynbaum & Nicod, 2004). Au demeurant, il appartient de refaire une autocritique sur la neutralité coupable des autorités africaines (Amaïzo, 2008) qui ont aussi péché par un excès de zèle dans la prudence, à vouloir limiter l’inflation à son niveau le plus bas, et en choisissant volontairement ou par inadvertance ou encore par absence de souveraineté réelle sur leur politique économique et monétaire, de ne pas soutenir le secteur privé en limitant l’accès au financement pour les entreprises locales.
L’Etat a aussi trop facilement cédé aux sirènes des institutions de Bretton-Woods y compris celles de l’Organisation mondiale du commerce, l’Union européenne ou des Etats-Unis[7] qui toléraient les subventions pour les pays industrialisés disposant d’influence économique alors que ceci était simplement interdit aux pays africains. Cette pratique est à l’origine de l’échec du premier mandat de Pascal Lamy qui n’a pas pu conclure l’agenda de développement de Doha[8] puisqu’il était plus question d’accepter le principe de la compensation pour les pays à influence forte qui, malgré des condamnations par les organes de règlements des différends de l’OMC, peuvent se permettre d’opter pour des compensations monétaires et au final de les stopper unilatéralement pour des trocs commerciaux conclus en bilatéral. Le cas des Etats-Unis et du Brésil sur les subventions agricoles doivent servir de référence[9], ceci d’autant plus que les Africains n’ont pas osé soutenir publiquement le Brésil dans son initiative, de peur de subir des mesures de représailles dans les domaines diverses telles que l’aide au développement, les facilités d’accès au marché, les ingérences intempestives non sollicitées pour ne citer que ces quelques points.
Il est donc clair que les règles du commerce internationales promues par l’OMC ont d’abord pour objet d’empêcher la protection de l’émergence des industries naissantes en Afrique sous couvert de signatures d’accords mondiaux sur les échanges, ceci dans un cadre de rapport de force asymétrique. Dans un tel système, les possibilités pour les pays faiblement industrialisés et économiquement faibles de faire entendre leur voix sans une approche collective sont quasiment nulles. Même dans le cadre d’une approche collective, les moyens importants permettant de se présenter devant les organes de règlements des différends sont dissuasifs, les délais relativement longs, les chances de voir son préjudice effectivement et correctement évalués, minces et enfin, les possibilités de voir le paiement effectué conformément aux décisions quasi-nulles du fait des rapports de forces asymétriques entre les pays. Dans ces circonstances, l’Afrique ne peut que d’abord organiser son marché intra-régional, créer une demande interne en revoyant sa conception de l’économie, de l’entrepreneuriat, le rôle et l’importance de la redistribution de pouvoir d’achat par le biais des structures productives et de les chances d’avancer vers une prospérité économique partagée dans le cadre d’un concept nouveau de solidarisme, un concept endogène.
Les fondements de la plupart des discours politiques prônant les nouvelles visions pour l’Afrique au moment des indépendances avaient en filigrane le solidarisme, ceci plus particulièrement chez Kwame N’Krumah. Mais Cheik Anta Diop voyait indirectement dans ce concept la restauration de la conscience noire. Il y a donc lieu au plan économique, de rechercher les conditions opérationnelles pour rendre effectif le « solidarisme » comme une alternative africaine à la conjonction d’une crise systémique de prospérité économique. Cela passe par un recentrage sur le mieux-être d’une grande partie de la population en jouant sur des approches stratégiques de régulation de l’Etat et une responsabilisation des acteurs économiques, créateurs de richesses vers un maintien du pouvoir d’achat afin d’organiser les marchés de proximité.
C’est aussi cette approche que Joseph Ki-Zerbo, l’historien, a résumé comme suit : « la régionalisation est la seule voie royale d’éradication de la pauvreté, de l’ignorance et de non-industrialisation structurelle, etc.[10] »
6. Manque de soutien au secteur privé africain : levier du crédit absent ?
Si la régionalisation n’a pas encore fonctionné en Afrique, c’est aussi parce que le principe de financement de l’économie et plus particulièrement celui du secteur privé et de l’entrepreneuriat par les intermédiaires financiers adaptés n’a pas véritablement fonctionné. Il est question ici tout autant du rôle des institutions financières internationales du développement qui n’ont pas soutenu le développement industriel africain, que de l’Etat qui a souvent oublié d’honorer sa dette intérieure vis-à-vis des entrepreneurs, causant ainsi en cascade un déficit de pouvoir d’achat. Il est question aussi des banques locales, trop occupées à parer au plus pressé et au moins risqué, qui se sont, de fait, concentrées sur les transactions commerciales sans création de valeur ajoutée. Il importe de rappeler que le nombre de pays où la dette intérieure représente plus de 15 % du PIB est en nette augmentation (Christensen, 2004).
Mais peut-être est-ce aussi la politique monétaire notamment en matière d’octroi de crédit, de refinancement des banques secondaires et surtout la fixation de taux d’intérêt élevé et en dissonance avec les coûts d’opportunité réalistes pour des entreprises industrialisantes qui ont conduit à retarder la prise de conscience du rôle d’entrainement et démultiplication du secteur productif en Afrique.
Les responsabilités sont multiples et partagées au point où les politiques de crédit des banques centrales, obnubilées par des critères de convergence économique fixés parfois en référence à des économies non africaines, ont alors promu la maîtrise de l’inflation comme la condition sine qua non de structuration des intermédiaires financiers en Afrique. En résultante, l’essentiel des institutions financières africaines n’ont pas soutenu le développement des structures productives en Afrique et ont même parfois empêché cet état de fait, soit par prudence excessive, soit par ignorance de l’importance du secteur productif dans l’économie, soit en fonction d’injonctions venues d’ailleurs. Dans tous les cas, c’est bien l’incapacité à fixer sa propre ligne stratégique en faveur des entreprises locales qui a conduit, entre autres l’Afrique, à une forme de désindustrialisation avant l’heure. Face à l’absence d’études pertinentes pouvant démontrer le bien fondé des entreprises transnationales en termes de création d’emplois décents en Afrique avec des effets multiplicateurs sur le tissu économique, il y a lieu de constater que l’essentiel des financements ont été orientés en priorité vers les entreprises publiques, grands budgétivores et peu performantes ou alors vers les entreprises multinationales étrangères à l’Afrique qui ne manquent d’obtenir de nombreuses dérogations fiscales au code des investissements et au code du travail au point que les investissements étrangers directs (IED) sont de plus en plus considérés comme des ressources génératrices d’endettement ou d’obligations additionnelles n’améliorant que rarement le mieux-être des populations.
Quand alors, suite à des difficultés de management et de gestion des entreprises publiques non sans responsabilités des Etats qui font de l’interventionnisme intempestif, on assiste impuissant, dans le cadre des conditionnalités des institutions de financement internationales de Bretton-Woods aux privatisations de pans entiers de l’économie d’un pays sans nécessairement que le service rendu à la population ne se soit amélioré comme dans les infrastructures, l’énergie et même dans le secteur productif. Il y a lieu de se demander s’il n’y a pas en filigrane, une volonté non écrite de dépossession des capacités productives de l’Afrique. Les privatisations, en tant que technique d’amélioration de la productivité d’une structure productive, ne sont pas remises en cause pour le principe. En réalité, ce sont des transferts de propriété, à des prix relevant du « dumping économique » qui interviennent lorsque les entreprises ont subi pendant plusieurs années des interventions et ingérences intempestives de l’Etat allant à l’encontre des règles les plus élémentaires en gestion et management.
C’est donc bien un comportement économique lié à la conception d’un Etat patrimonial qu’il y a lieu de rappeler. C’est aussi dans ce cadre que soutenir une petite et moyenne entreprise ou industrie locale ne permet pas des « retours rapides » pour ceux qui détiennent une parcelle du pouvoir de cession, d’orientation et d’accaparement des profits. La corruption, car il faut bien la nommer, est alors devenue un élément incontournable du mode de financement et d’octroi de crédit ou de garantie dans l’acquisition et la gestion d’une entreprise en Afrique. Ce n’est d’ailleurs pas étonnant que les institutions les plus soumises à des contrôles aient développé une forme de prudence excessive à l’endroit de tous les dossiers entrepreneurials où le risque est élevé.
Bref, en résultante, l’Afrique en oubliant de faire un choix stratégique en faveur de soutien au développement des structures productives endogènes, a laissé son secteur industriel être dominé par les apports extérieurs. Ces apports extérieurs, avaient d’abord pour priorité de rapatrier le capital, d’extraire la maximum des richesses africaines et d’aller créer la valeur ajoutée dans leur pays d’origine ou dans des lieux où les risques politiques et sociaux sont faibles. C’est en cela que l’Afrique a manqué de vigilance en laissant collectivement, et en toute déresponsabilisation, l’essentiel de la création de valeur ajoutée se faire ailleurs qu’en Afrique. Il n’est donc pas étonnant que les privatisations, les délocalisations dans les zones franches, les concessions d’entité de gestion tant dans les services que dans la production ou dans la finance ne profitent finalement pas en priorité à l’Afrique. La rénovation de la finance (Aglietta & Rigot, 2009) ne peut être qu’une forme d’euphémisme dont l’Afrique devra se méfier lors des réponses à apporter au plan international. Des collusions non écrites, échappant au champ économique proprement dit, sont venues renforcer cet état de fait au point que ce sont parfois, pour ne pas dire souvent, les Africains intelligemment distribués dans le maillage décisionnel en Afrique, qui travaillent pour le compte de ce que Jean Ping appelle « l’imperiem d’antan[11] » (Ping, 2009 : 293). Ceci n’est pas sans rapport avec l’occidentalisation-universalisation du monde au point où les modalités de fonctionnement de l’économie africaine doivent pouvoir fonctionner comme au cours de la période coloniale sauf que la colonisation n’a plus besoin d’être opérée par les anciens esclavagistes, il suffit de trouver en Afrique des relais, adeptes d’une certaine ventrologie déresponsabilisée[12] (Amaïzo, 2002 : 18).
Toutes ces contraintes ont poussé une partie de l’économie africaine vers le secteur informel qui n’est pas négligeable dans le secteur productif de proximité et dans la création d’emplois alors que le mode de fonctionnement échappe pour l’essentiel au circuit de financement. Forcer le secteur informel à retourner au secteur formel avec la menace d’une fiscalité inadaptée n’est pas la solution. Les agents économiques du secteur informel ont opté pour le financement direct, adapté à leur environnement économique et social avec une prédilection pour la liquidité. Les circuits bancaires classiques se refusent à aller sur ce marché considéré comme trop risqué, trop original et qui a besoin d’accompagnement et de sociabilité. Il n’empêche que ce circuit de financement existe et se développe sans être véritablement institutionnalisé et ayant un cadre juridique informel et lié à l’éthique de proximité.
Ce modèle d’intermédiation bancaire a été trop longtemps considéré tant par l’extérieur que par les Africains eux-mêmes comme un archaïsme, réminiscence d’une Afrique traditionnelle. Le fait de considérer le modèle dominant comme la norme et marginaliser ainsi une grande partie des Africains des circuits bancaires officiels, est une erreur d’appréciation qu’il convient de corriger car la finance informelle apparaît comme une forme de dérégulation tolérée où les innovations sont légions et le risque financier traité de manière compétitive. Il faut donc de la régulation dans le secteur financier informel africain afin de mettre à disposition des agents économiques, des financements à des coûts préférentiels fondés sur le poids des structures sociales existantes alors que le marché officiel ne répond pas du tout aux besoins de cette partie de la population africaine.
Le système bancaire classique est non-compétitif en termes de crédit bancaire car il est incapable d’évaluer et d’accompagner la prise de risque, ce que des structures performantes de la microfinance sont en train de réussir et dont la démultiplication fait encore défaut. Il importe donc de traiter le risque encouru dans un environnement donné pour permettre une baisse de coût de l’accès au crédit. Il va de soi que la faiblesse de l’immobilisation des emplois ne permet pas une prise de garanties réelles et l’absence de normes comptables rend aléatoire une évaluation financière au sens classique. La précarité qui entoure le promoteur d’un projet et son environnement dans un projet de financement informel ou de microfinance est remplacée par un lien personnel ou avec un groupe permettant alors aux fournisseurs de crédit d’exercer une pression morale et sociale sur l’entrepreneur ou l’initiateur du projet, ce qui est considéré comme un élément réducteur du risque et peut même permettre parfois de lever d’autres capitaux. C’est donc l’obligation morale qui tient lieu de garantie. Il s’agit véritablement d’un solidarisme contractuel.
De là à concevoir des nouvelles formes innovantes d’associations, de coopératives d’épargne et d’investissement n’est plus une hypothèse d’écoles puisque plusieurs pays africains sont en train d’expérimenter avec succès ce genre d’institutions financières reposant d’ailleurs sur une solidarité communautaire. En réalité, cette logique de la gestion s’inscrit dans une logique de l’optimisation des flux de trésorerie et donc du court terme. Dès que l’on s’inscrit dans la logique du développement avec un horizon-temps plus long, l’intermédiation financière dans le secteur informel peut ne plus être appropriée. Il n’est toutefois pas prouvé que le secteur informel « entretient le sous-développement » comme l’affirment de nombreux économistes non Africains[13].
Sur un autre plan, la solidarité peut s’exercer dans le cadre de structures continentales ou intercontinentales comme la Banque du Sud qui est une véritable prise de conscience de l’urgence d’une solidarité et d’une souveraineté monétaire, financière et économique des pays d’Amérique Latine.
Une banque du sud en Afrique n’est en fait qu’une banque de la solidarité… qui peut opter pour le financement du développement notamment des infrastructures ou alors s’occuper de couvrir les balances de paiement déficitaires sans que l’Etat africain ait besoin de faire appel à des capitaux hors de l’Afrique. Peu d’Etats africains sont pour l’instant prêts à contribuer sans demander une contrepartie sous forme de conditionnalités ou d’allégeance. Comme aucun Etat ne veut dépendre d’un autre en Afrique, la plupart préfère alors céder cette souveraineté monétaire à l’extérieur, souvent c’est le FMI ou les institutions financières non-africaines qui en profitent directement, du fait du manque de confiance entre les décideurs africains.
Il faut donc commencer avec quelques Etats africains volontaires et disposant d’un solde positif en termes de réserves internationales, de compte courant et de balance des paiements, etc. Il y a au moins onze pays en Afrique (en 2008) qui peuvent répondre à ces critères.
Vis-à-vis du FMI, un Fond monétaire africain devrait à terme avoir un rôle de soutien aux balances de paiements des pays… Si les financements peuvent se trouver aux niveaux régional ou continental, il n’y aura plus lieu d’aller au FMI que dans les cas extrêmes. Le FMI retrouvera sa véritable fonction et ne devrait intervenir qu’en dernier ressort et non de manière intempestive dans toutes les économies africaines, sans pouvoir réellement anticiper les crises financières.
Donc toute institution financière additionnelle dans le paysage économique et financier de l’Afrique devrait être perçue comme une nouvelle forme de concurrence qui ne peut se mettre en place qu’avec des gouvernements sérieux et volontaires, déterminés à servir leur peuple et à préparer l’avenir pour parachever l’indépendance économique et financière. Il faut espérer que le même sérieux, le même engagement et les mêmes énergies en termes de volonté viendront sur le continent africain par contagion…
Néanmoins, tant que les dirigeants africains feront croire que la solution aux problèmes africains proviendra d’ailleurs, et oublieront que le FMI et la Banque mondiale ont un conseil d’administration qui a pour objet de faire d’abord du profit, et de protéger les intérêts des pays majoritaires au conseil, alors l’Afrique n’est pas encore prête pour faire avancer un tel chantier. Il ne faut d’ailleurs pas s’étonner des retards accumulés et du rôle des gouverneurs africains de banques centrales optant pour une prudence excessive sans d’ailleurs souhaiter des options autres que le statu quo. Ces comportements ne peuvent plus être attribués à des formes d’exploitations exogènes mais bien plus à de l’ignorance ou à de l’irresponsabilité. Ce débat aussi doit avoir lieu car l’autosatisfaction ambiante tend à considérer que chaque gouverneur d’une banque centrale défend nécessairement les intérêts de son pays, de sa zone géographie ou de l’Afrique, ce qui n’est pas nécessairement exact compte tenu des contraintes extérieures.
Le défi posé est multiple, reflétant la complexité de la société africaine et ses pratiques monétaires et bancaires. Il importe d’éviter que l’excès de prudence dans le financement des structures productives locales ne se transforme graduellement en un système qui maintient la stagnation du continent, limite ou neutralise les actions innovantes envers le financement du développement ou alors rend ce financement usurier au point de développer la préférence pour la spéculation, l’arbitraire dans les accès aux crédits etc. Le rôle d’accompagnement de l’Etat, des banques d’appui au développement doit être revu peut-être dans le cadre d’une spécialisation des institutions. Au niveau du payeur en dernier ressort, c’est-à-dire en principe la banque centrale, il y a lieu de se demander s’il n’est pas venu le temps où la composition du conseil d’administration des banques centrales ne doit pas être revue en référence à ce qui se pratique avec la Fédéral Reserve Bank des Etats-Unis (Fed) qui permet l’entrée d’agents économiques privés sans que la gestion de la structure ne soit biaisée au profit de ce même secteur privé. La résultante est que cette banque centrale est plus à l’écoute de l’économie, tend à accompagner les changements plutôt que de les empêcher et reste indépendant des institutions politiques. La situation actuelle tend plus à conduire à la neutralisation de la dynamique du développement par un financement inadéquat du développement.
Il apparaît assez étonnant que le Président de la Fed, Ben S. Bernanke, dans un discours du 23 octobre 2009, rappelle qu’ « un élément fondamental d’une régulation financière effective demeure la protection des consommateurs des pratiques déloyales et frauduleuses. La récente crise illustre clairement les liens entre la protection des consommateurs et la sécurité et la solidité des institutions financières[14] ». Il ne propose rien de moins que «le renforcement d’une supervision consolidée, la mise en place d’un mécanisme (comme un conseil de contrôle systémique) qui aurait pour objet d’identifier et de surveiller les risques pour la stabilité financière, de créer un cadre qui permet en toute sécurité, d’identifier de manière systémique les entreprises à risques comme étant les éléments fondamentaux d’un nouveau système qui permettra de réduire la probabilité de crises futures et permettre d’atténuer grandement la gravité de tout ce qui peut arriver ».
L’Afrique ne peut continuer à ne pas se doter d’une institution de veille économique, financière et industrielle, et des agents de notation et d’évaluation des risques de crédit-exports. Cela devrait permettre, dans le cadre africain, de ne pas s’éloigner de l’économie réelle et répondre systématiquement aux attentes des agents économiques en Afrique. Le rôle de l’Etat est implicite tout au long du discours du Président de la Fed. Ce dernier, en conclusion, n’omet pas de rappeler que l’essentiel de travail se fera avec le Congrès américain, véritable agent de l’interventionnisme de l’Etat dans le contexte américain. Le rôle des parlements africains étant relativement moins important dans le processus d’interventionnisme des Etats, il y a lieu d’être innovant afin d’associer les représentants des agents économiques aux orientations futures à donner aux rôles des banques centrales africaines, en attendant la création d’une banque centrale africaine. Il y a lieu en Afrique de ne pas confondre les prudences excessives des institutions financières avec l’amélioration des politiques de supervision et de régulation. C’est cette approche qui pourra redonner un nouveau rôle d’appui au développement tant dans la politique du crédit, des taux d’intérêts, que d’accompagnement des structures productives dans un renouveau du financement du développement.
Pour l’Afrique subsaharienne, le FMI (IMF, 2009a : 27) recommande :
- d’améliorer la supervision des principales banques et institutions financières afin d’assurer la détection précoce de l’augmentation des risques de crédit, les insolvabilités potentielles et les problèmes de liquidités ;
- de réactiver la résilience du secteur financier ;
- de mettre en place des plans d’urgence reposant sur des mécanismes permettant de définir et d’apporter des mesures correctives en fonction des pays et des régions avec comme objectif d’assurer des injections de liquidité et de capitaux sans retards excessifs.
En réalité, il s’agit d’un phénomène de solidarité financière que pourrait entreprendre un fond monétaire africain afin d’éviter de bloquer ou neutraliser le processus de développement des structures productives et de l’économie en confondant d’une part, ajustement et stabilisation et d’autre part, financement et effet de levier avec comme objectif d’assurer à terme la souveraineté monétaire des économies africaines pris collectivement et individuellement.
Des efforts importants devront aussi être faits au niveau de la fiscalité et l’orientation structurelle des économies. Néanmoins, il importe de prendre les précautions d’usage lors de l’utilisation de données produites ailleurs pour des objectifs qui ne sont pas en termes de priorité nécessairement ceux de l’Afrique. Des solutions africaines aux problèmes africains s’imposent.
7. « Afrocentricité » de la prospérité économique africaine
Il y a lieu de faire au moins deux constats : la prospérité économique n’est pas au rendez-vous et les alternatives s’inspirant des politiques économiques passées essentiellement mimant le néolibéralisme en Afrique ne peuvent fonder un futur économique. Il y a lieu de repenser des visions et stratégies endogènes surtout que les crises tendent à toucher plus les femmes que les hommes en termes de chômage (UN, 2009b : 22), alors que les salaires baissent autant chez les femmes que les hommes (ILO, 2009. L’afrocentricité pourrait servir de cadre de définition nouvelle de la prospérité économique. A ce propos, les classifications 2009 des pays reflétant une certaine vision de la prospérité[15] rappellent que malgré les approches multicritères, la notion de bien-être ou de mieux-être demeure très subjective. L’Afrique gagnerait à identifier des critères intrinsèques qui pourraient mieux valoriser sa capacité de résilience face aux crises systémiques cumulées depuis des siècles.
L’impact de la crise financière de 2008 ne peut être dissocié des précédentes crises énergétiques et alimentaires qu’à connu l’Afrique subsaharienne et de manière générale les biais de comportements et de pratiques héritées des périodes avant les indépendances.
Tableau 4 : Impact de la crise 2008 sur l’Afrique
Quelques points saillants, 2009 et au delà |
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1 | Réduction accélérée de la demande pour les produits africains |
2 | Difficulté accrue d’accès au financement international directement notamment une demande additionnelle de garanties |
3 | Contraction drastique de l’activité économique liée à la contraction du commerce mondial |
4 | Augmentation substantielle du chômage, des emplois précaires, de la faim et de la pauvreté |
5 | Limitation des chances d’atteindre en 2015 les Objectifs du Millénaire du Développement |
6 | Réduction des flux de financement non basés sur des prêts notamment Investissement étrangers direct, investissement en portefeuille, Transferts de la Diaspora, Surplus commercial, Rentrées fiscales, les dons, l’assistance technique, etc. |
7 | Augmentation des déficits budgétaires liée à la baisse des rentrées fiscales |
8 | Augmentation de la volatilité des prix des matières premières avec parfois une chute concomitante des prix |
9 | Baisse du solde de la balance commerciale et de la balance des paiements et éventuellement des réserves |
10 | Perte de pouvoir d’achat renforcé par les pertes dans les termes de l’échange et dans les variations du taux de change |
11 | Augmentation des taux d’intérêts pour les entrepreneurs locaux et difficulté de solder la dette intérieure |
12 | Réduction drastique des recettes touristiques |
13 | Réduction et report dans les programmes de sécurité sociales et divers services sociaux |
14 | Perte de confiance généralisée dans l’économie néolibérale et la doctrine de la main invisible |
15 | Retour en force d’un rôle accru et intelligent de l’Etat |
Une liste non exhaustive est proposée pour faciliter la compréhension de la complexité du phénomène (tableau 4). La véritable nouveauté est la perte de confiance et la désillusion des Africains, y compris ceux qui soutenaient les intérêts des pays occidentaux en Afrique, les pays riches, notamment le G20 qui exclue les pays pauvres malgré une représentation symbolique de l’Afrique par le biais de l’Union africaine, s’est empressé de voler au secours des institutions bancaires et les opérateurs du marché boursier qui sont justement à l’origine de cette crise financière. La socialisation des pertes relève de l’injustice.
Comment peut-on voler au secours d’agents économiques qui ont choisi de privilégier l’économie virtuelle sans lien avec l’économie réelle ? Comment peut-on choisir de privilégier le paiement des primes même après la stabilisation de la crise financière avec l’argent des contribuables alors qu’une injection massive d’argent dans les secteurs productifs et sociaux aurait certainement changé la face du monde et les répercussions en Afrique. Privilégier la sauvegarde du système financier mondial sans d’ailleurs avoir réussi pour l’instant à faire disparaître les actifs toxiques mis en quarantaine, témoigne d’un mépris pour l’emploi, donc un mépris pour les populations.
Il y a lieu de croire que les 15 formes d’impacts de la crise financière de 2008 sur l’Afrique dès 2009 et au-delà ne sont que les signes avant-coureurs de crises collatérales et des externalités négatives à venir et contre lesquelles l’Afrique doit se prémunir en les anticipant (voir Tableau 4). L’arrogance de la confiance absolue dans la régulation par le marché, l’absence de transparence et d’éthique financière, les comportements irresponsables et impunis ont conduit à des prises de risques inconsidérées avec la spéculation de court-terme facilités avec les produits dérivés ont fait gonfler artificiellement la valeur des actifs quand ces derniers ne sont pas simplement des faux, appelés pudiquement des actifs toxiques.
L’autre grande leçon est l’incapacité d’anticipation et de prévoyance des grandes institutions internationales comme le FMI alors que ces dernières disposaient d’une capacité technique et d’expertise qui ne peut être remise en cause. Il y a donc peut-être des stratégies cachées où les conséquences de la crise financière étaient connues, mais n’ont pas été révélées au plus grand nombre. La conséquence directe est bien le retour de la « nationalisation » des structures productives. La régulation est donc de retour pour rééquilibrer et concilier les intérêts du public avec les intérêts des agents du marché (UN, 2009c : 3-4). La réalité est que les grandes promesses sur les réformes en profondeur du système financier international n’ont pas eu lieu et ce n’est pas les maigres avancées de quelques pays émergents (Chine et Inde) au conseil d’administration des institutions financières de Bretton-Woods qui vont modifier en profondeur la donne.
Il y a lieu donc de se concentrer sur les mesures que les Africains peuvent prendre en interne, forgeant ainsi leur unité et leur souveraineté monétaire à terme. La résistance de l’euro face au dollar américain n’est qu’un des nombreux exemples qui témoignant d’une stratégie gagnante lorsque l’unité des pays européens prédomine sur les intérêts particuliers.
Pour les pays africains, la crise financière a eu pour effet de mettre fin brutalement à un retour progressif des capacités de souveraineté budgétaire, ceci après plusieurs années de croissance économique en augmentation régulière en Afrique subsaharienne comme en Afrique. L’impact sur le solde budgétaire global du gouvernement avec ou sans les dons (moyenne pour l’Afrique subsaharienne et effectué à partir des ressources fiscales) est sévère. Ce solde qui était positif en 2008 a chuté à -4,8 % du PIB, ce qui signifie clairement que la marge de manœuvre pour mettre en œuvre des politiques endogènes est redevenue nulle. Comme ce chiffre n’a pas été enregistré depuis plus de 10 ans, il y a lieu de se demander s’il ne s’agit pas là d’un retour aux conditionnalités des institutions de Bretton-Woods, qui après des réductions de dettes ont redonné virtuellement une capacité d’endettement aux pays africains. Mais une capacité d’endettement de l’Etat avec des délais de grâce de plusieurs années équivaut à augmenter le degré de dépendance des Etats vis-à-vis des institutions de Bretton-Woods et indirectement des bailleurs de fonds bilatéraux. Il suffit d’ailleurs d’analyser l’évolution du solde budgétaire global hors
Tableau 5 : Afrique subsaharienne : Solde budgétaire global, 1997-2010
En % du PIB, (changement annuel moyen) |
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1997-2002 | 2003 | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | 2010 | |
Avec dons | -2.6 | -2.5 | 0.1 | 1.8 | 4.8 | 1.2 | 1.3 | -4.8 | -2.4 |
Hors dons | -3,8 | -3,8 | -1,2 | 0,7 | 1,6 | -0,1 | 0,3 | -6,4 | -4 |
Source: IMF (2009). Regional Economic Outlook, October 2009: Weathering the Storm, pp. 69 & 70. |
dons de l’Afrique subsaharienne et la comparer au solde avec dons pour s’apercevoir que l’Afrique a besoin de l’apport international (Tableau 5). Les grandes envolées lyriques de Dambisa Moyo sur la mort de l’aide (Moyo, 2009) et que l’Afrique n’a pas besoin d’aide sont intéressantes aux plans des principes, mais ne peuvent être soutenues face à la réalité de la situation de dépendance actuelle des budgets des Etats, pris collectivement ou même individuellement, comme le témoigne la situation des trois pays africains les plus durement touchés par la crise 2008 au plan du solde budgétaire (Tableau 6).
Il importe de faire l’analyse à partir de la situation hors dons et de mesurer ainsi la dépendance du gouvernement du pays en question par rapport aux ressources financières en provenance de la communauté internationale. En comparaison, il importe aussi de comparer la situation des pays africains qui sont les moins touchés et qui ont vu leur solde budgétaire s’apprécier (Tableau 7). Il faut noter
Tableau 6 : Solde budgétaire global des trois pays les plus durement touchés par la crise 2008 en 2009
1997-2010, en % du PIB, (changement annuel moyen) |
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1997-2002 | 2003 | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | 2010 | ||
Guinea-Buissau | Avec dons | -10,4 | -11,6 | -13,8 | -11,7 | -8,3 | -10,8 | -7 | -3,2 | -2,1 |
Hors dons | -20,1 | -21,4 | -30,1 | -24,4 | -19,8 | -25,6 | -21,9 | -42,6 | -39,2 | |
Sao Tomé et Principe | Avec dons | -16,2 | -10,5 | -15,8 | 37,1 | -13,7 | 120,3 | 14,7 | 12,6 | -13,3 |
Hors dons | -36,8 | -30,1 | -35 | 20 | -29,6 | 0,2 | -15,3 | -34,9 | -29 | |
Burundi | Avec dons | -4,2 | -6,2 | -4,9 | -5,1 | -1,4 | 1 | -1,3 | 60,1 | -5 |
Hors dons | -6,9 | -13,8 | -19,7 | -16,8 | -19,3 | -19,8 | -25,2 | -24,4 | -26,1 | |
Source: IMF (2009). Regional Economic Outlook, October 2009: Weathering the Storm, pp. 69 & 70. |
que les trois pays africains les moins touchés par la crise de 2008 sont des pays exportateurs de pétrole. Les pays les plus touchés sont bien sûrs parmi les plus fragiles, plus vulnérables que les pays à revenu faible sur le continent. Il faut noter que ni le Congo, ni la Guinée Equatoriale ne bénéficient de dons alors que le Gabon bénéficie de quelques subsides en provenance des pays donateurs. Il n’est d’ailleurs pas étonnant face à cette situation que ce soit la région d’Afrique centrale qui soit la seule à être résiliente (en intégrant les dons) avec 1,1 % alors que toutes les autres régions sont en négatif y compris la zone franc avec -1,2 % (IMF, 2009a : 69 & 70).
Il est donc facile à comprendre que la plupart des pays qui bénéficiaient d’une marge budgétaire ont pu lancer un plan de relance immédiate alors que la plupart des pays africains ne disposant pas de marges budgétaires ne pourront compter au mieux sur la solidarité africaine et éventuellement des pays amis ou alors sur leurs propres forces. Le rôle de la Chine au cours de cette période difficile doit être apprécié malgré les critiques sur la non-prise en compte de la situation de gouvernance interne, de démocratie et des droits humains.
En effet, ce sont les pays émergents notamment la Chine, le Brésil et l’Inde qui ont atténué les
Tableau 7 : Solde budgétaire global des trois pays les moins durement touchés par la crise 2008 en 2009
1997-2010, en % du PIB, (changement annuel moyen) |
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1997-2002 | 2003 | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | 2010 | ||
Congo (Rép.) | Avec dons | -4,6 | 0,4 | 3,6 | 14,6 | 16,5 | 10,3 | 25,9 | 7,3 | 24 |
Hors dons | -4,9 | -0,1 | 3,3 | 14,5 | 16,4 | 9,9 | 25,5 | 6,7 | 23,3 | |
Gabon | Avec dons | 1,2 | 7,4 | 7,6 | 8,6 | 9,2 | 8,5 | 11,4 | 3,7 | 4,9 |
Hors dons | 1,2 | 7,4 | 7,5 | 8,6 | 9,2 | 8,5 | 11,4 | 3,6 | 4,9 | |
Guinée Equatoriale | Avec dons | 4 | 11,8 | 12,3 | 20,6 | 23,5 | 17,8 | 15,3 | 2,6 | 7 |
Hors dons | 3,7 | 11,8 | 12,3 | 20,6 | 23,5 | 17,8 | 15,3 | 2,6 | 7 | |
Source: IMF (2009). Regional Economic Outlook, October 2009: Weathering the Storm, pp. 69 & 70. |
répercussions les plus graves de la crise financière de 2008 sur l’Afrique. Les échanges (triplés en trois ans) de près de 108,7 milliards de $EU en 2008 entre l’Afrique et la Chine ont permis de réduire les dépendances économiques envers les partenaires traditionnels sans pour autant augmenter les conditionnalités hypothéquant les marges de manœuvre budgétaire en Afrique. Aussi, l’amenuisement des importations de l’Afrique en provenance de l’Union européenne et la diversification concomitante avec les pays émergents sont en train de rendre opérationnel le concept de coopération « sud-sud ».
Mais le vrai problème soulevé est « qu’alors que certaines économies émergentes ont une stratégie africaine, l’Afrique n’a pas de stratégie envers les économies émergentes »[16]. Toutefois, la croissance du commerce avec les pays émergents ne s’accompagne pas du développement des structures productives et l’accroissement de la diffusion de la technologie. En conséquence, la structure des échanges africains reste dominée par des échanges de produits non transformés, particulièrement le pétrole, les minerais et les matières premières agricoles. Si le nombre de pays africains fournissant les pays émergents reste limité à une dizaine sur 54 pays africains, ce sont aussi les nouvelles approches de « sécurisation » des approvisionnements de matières premières en Afrique qui posent problème. Il s’agit des contrats portant sur les « ressources ou espaces naturels » contre infrastructures dans le cadre d’un contrat long terme (50 ans ou plus renouvelable) et des facilités de crédits et des garanties d’Etat qui profitent essentiellement à des entreprises émergentes avec d’ailleurs un transfert de ressources humaines à sens unique aux dépens des travailleurs africains. En prenant l’exemple de la Chine et l’Afrique, de nombreuses critiques ont été soulevées comme :
- les entorses à la transparence aux procédures commerciales, d’investissements et de transferts financiers ;
- Les entorses aux règles élémentaires de conditions de travail, de sécurité et d’emplois décents ;
- Le blocage du décollage de l’industrialisation et de la diffusion des contenus technologiques ;
- Le silence sur les violations des droits humains et un renouvellement de l’approche des relations basées sur les relations de personne à personne qui ouvre le champ à la corruption et l’évasion fiscale ;
- La dépendance de l’Afrique envers ses produits non transformés ;
- Le nombre trop limité ou l’absence de création d’emplois décents remplacés d’ailleurs par des travailleurs venus d’ailleurs en masse ;
- Le refus d’introduire du contenu technologique et de laisser les plans permettant la diffusion du savoir-faire et des technologies.
Le nouvel endettement « facile » qui prend corps, et qui repousse sur les générations futures le poids de la dette, rappelle comment la souveraineté endogène s’est évaporée au profit d’une souveraineté exogène au cours des périodes coloniales et postcoloniales. C’est cela qui risque rapidement de limiter les chances alternatives offertes à l’Afrique pour se développer puisque cette nouvelle dépendance financière non convertie en investissement local et en développement pérenne se révélera n’être qu’un nouveau fardeau surtout si les mesures proposées de l’extérieur, apparaissent alors comme de véritables palliatifs, promus par les Africains eux-mêmes.
8. Vers des économies à revenus intermédiaires
Il devient absolument indispensable de rompre avec l’approche de l’économie palliative, que cela soit conscient ou inconscient, car les coûts et les manque-à-gagner pour l’économie africaine et les Africains sont trop importants. En réalité, il est question de savoir si le 21e siècle n’est pas d’abord le siècle des « Asiatiques » et non des Africains et de s’interroger si dans les 50-100 ans, les contrats dits d’infrastructures que certains dirigeants africains sont en train de signer aujourd’hui ne dépossèderont pas les Africains de leur sol et sous-sol. Une crise financière et ses conséquences ne peuvent donc plus être analysées de manière conjoncturelle, mais bien en fonction des liens systémiques qui tendent à diversifier la vulnérabilité et l’insécurité économique de l’Afrique.
Les réponses à apporter ne sont plus à rechercher nécessairement d’abord au plan technique, ni peut-être même au niveau des idées, car l’Afrique a produit des solutions, mais ne les met pas en œuvre démocratiquement. Le futur économique de l’Afrique, ses visions et ses stratégies doivent nécessairement être fondées sur le concept de l’Afrocentricité. Le mimétisme, l’alignement et l’universalisme des solutions importées sans déconstruction-refondation avec la participation active des agents économiques africains peuvent se révéler n’être qu’un leurre, retardant les prises de conscience sur le continent. La dérégulation doublée d’un rapport de force avec des concepts peu maîtrisés d’un néolibéralisme sans contre-pouvoir sont en train de structurer les bases d’une anarchie au plan économique. La situation de la Somalie ou de l’Ouest du Congo démocratique ou des parties du Soudan ne sont que des signes précurseurs d’un monde qui continue à faire croire que l’Afrique n’est qu’une variable d’ajustement.
Aussi pour repenser un retour vers des stratégies de souveraineté monétaire, financière, budgétaire et économique, il faut rompre collectivement tant au niveau politique qu’au niveau des comportements et pratiques avec le principe de la « maximisation des profits » comme le fondement de la création de richesse en Afrique. C’est au contraire une nouvelle taxonomie portant sur la « prospérité économique » qui doit permettre de mesurer le bien-être des
Africains. Cette prospérité économique ne peut se réaliser sans une forme d’interventionnisme intelligent de l’Etat, un Etat qui fonctionne avec l’éthique comme point d’ancrage. L’objectif de l’Etat et des agents économiques en Afrique est clair. Il importe d’aller vers des économies à revenus intermédiaires et donc de faciliter la montée en phase des classes moyennes (Ravallion, 2009).
Une démocratisation de la régulation devrait alors permettre d’empêcher la fiscalité de neutraliser les phases d’évolution vers la classe moyenne pour une majorité des citoyens africains. Il y a lieu ainsi de se démarquer des concepts obsolètes comme « la réduction de l’extrême pauvreté » pour épouser des concepts nouveaux de création de richesse, promotion de la prospérité économique et apprendre à mesurer l’évolution des revenus et donc du pouvoir d’achat vers des objectifs accessibles.
L’Asie a choisi d’organiser sa souveraineté économique en interne et a réussi à démontrer des performances économiques de résilience à la crise. Cette étape de la volonté politique collective ne peut être considérée comme acquise en Afrique. Elle sous-tend toute volonté effective et déterminée vers la recherche d’une sécurité économique sur le continent. Les asymétries dans les approches commerciales, le financement du développement et la participation de tous les agents ne peuvent faire l’objet de segmentation lorsque l’on recherche une efficience collective. Ce changement structurel passe par une véritable prise de conscience et moins par des plaintes plus ou moins sincères sur la recherche des bouc-émissaires à l’extérieur de l’Afrique.
Comme il va s’agir d’engagement, ne peuvent alors prétendre participer au mouvement de recherche et mise en œuvre de la souveraineté économique et monétaire de l’Afrique que des candidats volontaires parmi les Agents économiques, y compris les Etats. C’est le refus d’accepter le principe du volontariat et de préférer celui du consensus mou fondé sur le plus petit dénominateur commun, qui contribue au bougisme et à la stagnation dans la libération des énergies nouvelles pour faire décoller le continent. Ce changement structurel a besoin d’une forme juridique nouvelle en économie, il s’agit du « solidarisme contractuel » en économie qui aura pour objet de baliser et de rendre « responsable et comptable » ceux qui, volontairement, se seront déclarés prêts à promouvoir le « bien public » économique et l’intérêt général en Afrique.
9. Principales conséquences de la crise financière sur l’Afrique
Du fait de la volatilité des ressources pour le développement, il a lieu d’institutionnaliser des contre-pouvoirs dans l’économie et la finance afin de retrouver des équilibres dans les arbitrages sur les allocations de ressources et les priorités.
La crise financière de 2008 n’a pas été anticipée, ni par les pays riches industrialisés, ni par l’Afrique. L’Afrique n’a pas directement été touchée par la crise bancaire qui s’en est suivie même si les ressources financières pour le développement se sont raréfiées. Bien que l’inflation ait été globalement maîtrisée sur le continent, les objectifs à moyen terme de l’Afrique doivent être reconsidérés ou repoussés dans le temps. L’inflation pour l’Afrique qui était autour de 24,5 % entre 1991-2000 s’est graduellement retombée à 6 % en 2007 avant de remonter à 10,3 % en 2008 et retomber à 9 % en 2009 (IMF, 2009b : 177). En comparaison, l’Union européenne est estimée à 0,9 % pour 2009 avec 3,7 % en 2008. Bien sûr les disparités au niveau des pays sont importantes.
En analysant sommairement les principaux agrégats macro-économiques enregistrés officiellement, il est possible de conclure que l’Afrique ne connaîtra pas la récession des pays riches industrialisés en 2009 mais que les avancées de l’Afrique en termes de progrès au plan du développement seront fortement ralenties. L’effet de contagion bancaire tant attendu n’a pas eu lieu du fait d’un manque d’infrastructure financière moderne et intégrée.
La plupart des pays africains qui ont profité des termes de l’échange favorables des prix des matières premières entre 2007 et 2008 ont pu créer ou renforcer de ces fonds souverains. Il s’agit principalement de fonds d’investissement détenus par un Etat et la transparence de ces fonds reste hypothétique. Ces fonds ne se sont pas dirigés vers des fonds spéculatifs mais ont souvent préféré investir sur le continent, évitant soigneusement le secteur productif. [Ces fonds existant formellement en Libye, Algérie, Nigéria, Botswana, Gabon, Soudan et Sao Tomé et Principe sont estimés à 124,42 milliards de $US à la mi-2008 et ne représentaient que 4,1% de l’Afrique dans la part mondiale (Kasekende, Ndikumana & Rajhi, 2009 : 4).
Par contre, d’autres pays comme la Tunisie[17] ont rencontré des problèmes de confiance sur le marché financier, ce qui a eu pour conséquence d’augmenter considérablement les taux d’intérêts lors des tentatives de mobilisation directe de financement sur le marché international. Cela a conduit à rechercher sur le marché local africain des ressources. Cette approche pourrait être encouragée.
Par ailleurs, de nombreuses banques privées africaines sont en majorité détenues par des banques étrangères, parfois à plus de 100 % comme au Mozambique, Madagascar et Swaziland. Les conséquences directes de la crise sur la maison-mère ne seront pas diffusées dans les structures délocalisées mais ont conduit à des assèchements du crédit au plan local, notamment pour le secteur productif qui était déjà un parent pauvre des encours de crédit.
La volatilité des taux de changes et de nombreuses monnaies africaines en référence à l’Euro et au Dollar des Etats-Unis, principales monnaies de contrepartie pour l’Afrique et les pertes sur certaines matières premières ont conduit à la dépréciation des réserves internationales. Entre le 31 juillet 2007 et le 13 février 2009, les fluctuations des monnaies africaines ont varié entre ‑99,1 % pour le Zimbabwe (avec le Dollar Zimbabwéen), -52,4 % pour les Seychelles (avec la Roupie Seychelloise) ou encore -38 % pour le Congo démocratique (avec le Franc congolais), -33,5 % pour la Zambie (avec le Kwacha Zambien) pour les dépréciations les plus importantes. Les appréciations sont plus modestes avec 0,8 % pour Sao Tomé et Principe (avec la monnaie Dobra), 0,2 % pour le Malawi (avec la monnaie Kwancha) et paradoxalement la Somalie (avec le Shilling Somalien), (Kasekende, Ndikumana & Rajhi, 2009 : 6).
Il y a lieu aussi de noter les fluctuations importantes des prix des matières premières non transformées entre 2000 et 2010 sauf pour les métaux et minéraux. Il suffit de rappeler le cas du Botswana ou de la Zambie qui dépendent trop exclusivement respectivement du diamant et du cuivre pour comprendre l’impact négatif des manques à gagner occasionnés par la volatilité et les termes de l’échange défavorables dans leur réserve et leur solde budget. Il en est de même pour les produits énergétiques (pétrole, gaz et charbon), les produits non pétroliers, et plus particulièrement les produits alimentaires et les produits ferreux et minéraux, pour ne prendre que ces quelques exemples (voir tableau 8).
Tableau 8 : Prix des produits des matières premières, 2000- 2010, estimation
En % (changement annuel) |
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Changement annuel, en % | 2000-2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | 2010 |
Energie (pétrole, gaz, charbon) | 13,5 | 17,3 | 10,8 | 45,1 | -25 | 0,9 |
Non-énergie | 8,3 | 29,1 | 17 | 22,4 | -23,2 | -4,3 |
Produits alimentaires | 6 | 10 | 25,6 | 35,2 | -23,4 | -0,3 |
Minerais et produits ferreux | 12,3 | 56,9 | 12 | 5 | 25,5 | 5,5 |
Source : World Bank, Global Economic Prospects 2009, Commodity markets at the Crossroads, Washington D. C. |
La chute du cuivre passant de 0,6 % en 2008 à -32,2 % en 2009 permet de mesurer les conséquences directes sur le solde budgétaire négatif de la Zambie sans dons, passant en 2008 de -5,2 % à -6,4 % du PIB en 2009, équivalent à un tassement de la balance commerciale pour la même période chutant de 2,7 % à 1,8 % du PIB en référence à 11,2 % en 2006 et 7,9 % du PIB en 2007 (IMF, 2009b : 78).
Au niveau du commerce des biens et services, l’Afrique subit de plein fouet la chute spectaculaire du commerce mondial en 2009 évalué autour de –11 %, ce qui constitue la chute la plus spectaculaire depuis 1940 (IMF, 2009). La balance commerciale de l’Afrique subsaharienne qui était excédentaire depuis 1997 et était de 8,6 % du PIB en 2008 a chuté à 1,6 % en 2009 (IMF, 2009a : 78), même les projections sont de 3,9 % pour 2010, soit le niveau de la période 1997-2002. Au niveau sous-régional, c’est l’Afrique centrale (CEMAC) qui est la plus résiliente avec 19,7 % du PIB en 2009 alors qu’elle était à 33,5 % du PIB en 2008. L’Afrique de l’ouest francophone (UEMOA) en comparaison est déficitaire, avec -3 % du PIB en 2009 (voir tableau 9).
Tableau 9 : Balance commerciale par sous-régions, 1997-2010,
en % du PIB |
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En % du PIB | 1997-2002 | 2003 | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | 2010 |
Zone Franc CFA | 8,9 | 9,3 | 11,8 | 15,5 | 17,2 | 15 | 15,9 | 7,9 | 10,7 |
UEMOA | 2,3 | 1,5 | 0,3 | -0,9 | 0,1 | -3,5 | -3,9 | -3 | -3,5 |
CEMAC | 17,4 | 19,1 | 24,6 | 31,7 | 33,3 | 32,5 | 33,5 | 19,7 | 24,9 |
CEAE (5 pays) | -7,4 | -7,6 | -8,8 | -9,9 | -12,9 | -14,2 | -14,9 | -14,5 | -13 |
COMESA | -0,8 | -1 | 1,7 | 5,8 | 9,4 | 10,9 | 11 | -0,1 | 2,7 |
SADC | 2,7 | 2,2 | 1,6 | 3,2 | 3,9 | 4,9 | 6 | 0,7 | 1,3 |
Source : IMF, Regional Economic Outlook 2009: Sub-Saharan Africa, Weathering the Storm, p. 78 |
De manière générale, il faut s’attendre à une augmentation des mesures protectionnistes.
Au niveau des flux de capitaux vers l’Afrique, on distingue en principe les grandes catégories : l’investissement étranger direct, l’investissement en portefeuille, les transferts d’argent de la Diaspora et l’aide au développement et les dons privés. L’ensemble de ces flux ont progressé régulièrement entre 2000 et 2007 passant respectivement de 8,9 million de $US à 54,8 million de $US, soit plus de 6,5 fois l’aide publique au développement estimé à 8,5 million de $US (Arieff, Weiss & Jones, 2009 : 10). Après avoir augmenté de 16,8 % entre 2007 et 2008 passant de 53 à 61,9 milliards de $US en Afrique (UN, 2009d), les IED devraient chuter de 26,7 % entre 2008 et 2009. Les prêts interafricains risquent de diminuer de près de 50 % en comparaison avec d’autres régions émergentes qui ne baissent que de 20 %. L’investissement en portefeuille avait entamé une chute entre 2006 et 2008 passant respectivement de 18,7 milliards de $US à 16,7 milliards de $US. En réalité, les investisseurs en portefeuille ont fui les bourses africaines pour des lieux jugés plus sûrs et plus liquides (IMF, 2009a). Entre 2004 et 2007, l’essentiel de l’investissement en portefeuille s’est concentré en Afrique du sud avec 72,8 % avec 5,6 % pour le Nigeria, 2,2 % pour le Ghana, 2 pour l’Angola, 1,7 % pour le Kenya et 15,7 % pour tout le reste de l’Afrique (Arieff, Weiss & Jones, 2009 : 11). Il semble qu’au cours du deuxième semestre de 2009, l’Afrique pourrait attirer à nouveau des investisseurs en portefeuille (Brambila & Massa, 2009). Il n’empêche que les montants restent assez modestes par rapport aux autres régions du monde.
Les transferts de fonds de la Diaspora apparaissent plus stables et donc plus prévisibles en termes de gestion sur le terrain. C’est aussi le fond qui se «transforme » le plus rapidement en assistance directe en réduction de la pauvreté car ces fonds vont rarement vers les investissements à moyen-terme. 18,59 milliards de $US avaient été enregistrés en 2007 de manière officielle soit environ 3,7 % en moyenne du PIB en Afrique. Il faut noter la performance du Lesotho avec 29 % du PIB de transfert de la Diaspora. Mais la chute liée à la crise est estimée autour de 5-8 % en 2009 à partir de 305 milliards de $US en 2008. C’est toutefois le chômage, les coûts exorbitants des institutions spécialisées de transfert de fonds qui constituent le manque à gagner pour les populations africaines (Arieff, Weiss & Jones, 2009 : 12). Pour les transferts provenant de la Diaspora résidant en Afrique vers d’autres pays africains, les difficultés du secteur minier contribuent directement à réduire les montants, ce qui se ressent directement sur le niveau de couverture alimentaire, de l’éducation, de la santé et des besoins essentiels des populations récipiendaires.
La crise a contribué à une réduction substantielle de l’aide bilatérale, ce qui globalement fait reculer l’aide. Les pays comme la France et l’Italie, malgré les déclarations, ont procédé à des coupes dans leur aide au développement présentée d’ailleurs avec des priorités vers les réalisations à long terme et des inclusions d’activités diverses qui tendent à rendre la définition de l’aide bien extensible et parfois sans que les fonds ne soient effectivement transférés. En effet, l’aide au développement venant réduire la dette en soldant les intérêts de la dette n’a jamais été ressentie directement sur le terrain par les populations. Il n’est pas étonnant que malgré des conditionnalités qui ne diminuent pas, certains économistes considèrent que l’aide est un frein au développement de l’Afrique (Moyo, 2009). Ce sont ces définitions extensives et à géométrie variables que reflètent les statistiques avec une évolution des dons, considérés comme une aide publique, pour l’Afrique subsaharienne passant de 0,9 % du PIB en 2008 à 1, 6 % du PIB en 2009 (IMF, 2009a : 81).
En conséquence, il ne faut pas s’étonner que malgré des réserves des pays africains plutôt stables ou en légère augmentation, les effets de la crise se font sentir surtout sur les comptes courants avec l’extérieur y compris avec les dons qui demeurent largement déficitaires pour l’Afrique subsaharienne avec une contraction passant de 1 % en 2008 à -3,1 % en 2009. Au niveau des pays, il faut noter qu’en 2009, le Libéria devrait enregistrer la plus mauvaise performance de l’Afrique subsaharienne avec une contraction de -41,8 % alors que la Côte d’ivoire devrait enregistrer la meilleure performance avec 24,6 % du PIB (IMF, 2009a : 79). Au niveau des sous-régions, c’est l’UEMOA qui passe de -6 % en 2008 à 1,1 %, grâce d’ailleurs à la performance de la Côte d’Ivoire alors que toutes les autres sous-régions africaines sont en contraction.
De manière générale, l’Afrique devrait passer d’un surplus budgétaire de 2,3 % du PIB en 2008 à un déficit de 5,5 % en 2009 alors qu’au niveau du compte courant, le surplus de 3,5 % du PIB en 2008 se sera évaporé pour offrir un déficit de -3,8 % du PIB en 2009. L’Afrique du nord conservera un surplus d’environ 3 % du PIB avec des performances remarquables pour le Maroc, 10,7 % et l’Algérie, 5, 6 % (Kasekende, Ndikumana & Rajhi, 2009 : 12). L’asymétrie est palpable au niveau des importations en augmentation par rapport à des exportations déclinantes. Il y a là un début d’asymétrie et d’émergence de déficit structurel qui risque de remettre en cause les objectifs à moyen-terme des pays. Ceci est d’autant plus important à prendre en compte que l’inflation reste élevée et que la masse monétaire au sens large est en augmentation passant de 48,6 % du PIB en 2008 pour l’Afrique subsaharienne à 52,5 % en 2009 (IMF, 2009a : 73). .
10. Afrique : manque à gagner de 3,5 % de croissance économique en 2009
L’Afrique subsaharienne a globalement un manque à gagner de croissance économique liée aux conséquences de la crise financière d’environ 4 % passant de 5,1 % en 2008 à 1,1 % en 2009 (IMF, 2009a : 62). Au niveau de toute l’Afrique, ce manque à gagner de croissance demeure élevé avec 3,5 % passant de 5,2 % en 2008 à 1,7 % en 2009 (IMF, 2009b : 169). Les secteurs particulièrement touchés restent le tourisme, les mines, le textile et l’habillement, et bien sûr le secteur productif avec de nombreuses fermetures d’entreprises. Le niveau particulièrement élevé des coûts de transaction. Le coût pour faire des affaires en Afrique restent dissuasifs sans compter les pertes collatérales en termes de destruction d’emplois et d’opacité du système juridique malgré des efforts d’harmonisation, mis en œuvre de manière bien asymétrique.
L’Afrique doit nécessairement revoir ses capacités à créer une prospérité et une résilience économiques. Elle doit compter sur elle-même en priorité et mettre en œuvre le renforcement des structures productives et la mobilisation de ressources financières qui génèrent le moins d’endettement et de conditionnalités. L’amélioration de l’infrastructure physique, de la communication et de l’information aux agents actifs dans la production et le secteur privé en général devrait permettre d’améliorer la compétitivité africaine. Mais la priorité doit être donnée à la satisfaction du marché de proximité avec un meilleur équilibre dans la distribution du pouvoir d’achat. Pour ce faire, et bien que les données sur la dette intérieure fassent défaut, c’est pourtant cette dette envers les entreprises locales qui doit se voir attribuer une priorité bien au-dessus du remboursement du service de la dette extérieure. L’appui sectoriel ne doit avoir lieu que dans un plan sectoriel où les trois premiers niveaux de transformation de la chaîne de valeurs devront se réaliser en Afrique. Il va de soi que les nouveaux partenariats intelligents doivent associer les agents économiques à tout le processus de restauration de la prospérité, base d’un élargissement de l’assiette fiscale et donc des recettes de l’Etat à moyen-terme. La fiscalité, l’autre aspect déterminant de la capacité et de la souveraineté d’un Etat devra être réorganisée. Pour faciliter des réformes en profondeur, il y a lieu d’annoncer à l’avance dans le cadre d’un pacte de soutien au pouvoir d’achat et de nouveau concept comme le « solidarisme contractuel » pour libérer les expertises, les talents et le savoir-faire au service des citoyens africains.
L’approche ne peut reposer sur un simple renouvellement des processus et des pratiques anciennes, parfois téléguidées de l’extérieur. L’Afrique doit pouvoir rappeler que n’étant pas responsable, ni fautive dans cette crise financière de 2008, elle a des droits et des devoirs vis-à-vis de ses populations. Il y a lieu de revoir donc les concepts et surtout d’adopter un programme glissant de moyen-terme avec une vision structurée autour d’une nouvelle vision de la prospérité économique fondée sur l’introduction de contenu technologique et la diffusion du savoir avec la participation des agents économiques et un processus pour rendre des comptes. La volatilité des marchés ne permet plus de reposer les analyses et structuration des budgets des Etats sur l’hypothétique financement en provenance de l’aide au développement. L’Afrique n’est pas en récession et doit trouver les voies et moyens pour doper sa productivité. En effet, tous comptes faits, le manque à gagner de l’Afrique s’est manifesté directement dans les flux commerciaux, les flux financiers notamment la mobilisation de ressources pour l’Afrique, dans les budgets des Etats, dans l’absence d’investissement suffisant, dans la marginalisation accrue du secteur productif et bien sûr, dans la fuite des capitaux, la corruption et l’impossible redistribution au niveau des filets sociaux. Pour ce faire, il y a lieu de s’interroger sur les ressources propres de l’Afrique notamment la fiscalité.
11. Vers une fiscalité responsable et adaptée
Il n’est pas possible de traiter de la souveraineté économique en Afrique sans évoquer la fiscalité et sa responsabilité dans la redistribution des fruits de la croissance économique. Les revenus de la taxe collectée par le gouvernement central des Etats africains se situaient en 2007 entre 6 % du PIB au Congo (Brazzaville) et 56,8 % au Lesotho avec des nombreux pays qui ne fournissent pas les statistiques sur ce sujet (World Bank, 2009c). Le secteur privé et notamment les entreprises se sont régulièrement plaints des contraintes au nombre desquelles trois principales peuvent être mise en lumière en juin 2008 en Afrique subsaharienne :
- plus de 38 types de paiements pour s’acquitter de ses obligations fiscales vis-à-vis de l’Etat en Afrique alors que 16 suffisent dans les pays industrialisés ;
- en moyenne de 312 heures sont nécessaires pour se mettre à jour vis-à-vis de l’administration fiscale alors qu’il ne faut que 181 heures dans les pays industrialisés ;
- la pression fiscale sur les entreprises en termes de taxation sur les profits est élevée avec 66,9 % en Afrique subsaharienne[18] contre 40,3 % dans les pays industrialisés et 39,9 % en Asie région est et pacifique ou 48,6 % en Amérique latine et caraïbes (World Bank, 2009c : 292).
Les Etats africains ne sont pas réputés pour promouvoir le secteur privé. Il n’est pas impossible que le problème de la prédation et la ponction arbitraire faites sur le secteur privé proviennent d’une grave incompréhension sur la conception de la création de richesse et de la prospérité économique en Afrique. C’est ainsi que l’Afrique subsaharienne a pu équilibrer son solde budgétaire sans les dons en 2008 avec 0,3 %[19] du PIB et de 1,3 % du PIB avec l’apport des dons. Par contre, les conséquences de la crise sont palpables avec une contraction assez significative avec un solde budgétaire sans les dons en 2008 avec -6,4 %[20] du PIB et de -4,8 % du PIB avec l’apport des dons (IMF, 2009a : 69 et 70).
Au-delà des chiffres, l’assiette fiscale permettant une large collecte est relativement petite en Afrique et dépend dans une grande mesure des taxes sur les échanges. Avec le principe de la libéralisation totale des marchés, cette taxe ira en s’amenuisant sans d’ailleurs qu’une autre alternative ait été trouvée. Les taxes sur les exportations tendent d’ailleurs à discriminer les structures productives et plus particulièrement l’industrialisation. La taxe sur les importations, même discriminatoire, ce qui permettrait de choisir les produits importés, conduit souvent à des abus par manque de contrôle et est appelée à disparaître avec la libération graduelle des économies africaines.
Il importe pour les économies africaines d’utiliser une fiscalité intelligente pour promouvoir les industries locales et les mettre à niveau avant une libéralisation complète des économies notamment si les Etats africains mettent en œuvre les recommandations de l’OMC. Les taxes uniformes ne sont pas recommandées car le manque de discrimination vis-à-vis des secteurs agricoles et industriels va à l’encontre des intérêts de l’Afrique. C’est bien la discrimination intelligente qui va permettre d’attirer tant les entreprises éthiques que favoriser la diffusion de la productivité et des contenus technologiques. Une certaine progressivité, discutée avec les agents économiques concernés, devrait permettre non seulement de soutenir des secteurs entiers mais aussi d’organiser des transferts qui viennent en appui au secteur lui-même comme par exemple dans la recherche et le développement ou la formation.
Là où un vrai problème se pose, c’est lorsque le déficit dans la mobilisation de la fiscalité locale peut conduire à une substitution par l’aide extérieure avec les conséquences sur la souveraineté de l’Etat et les interférences politiques de l’extérieur. Par ailleurs, certains gouvernements, par irresponsabilité, se contentent de ne plus faire l’effort d’organiser la collecte et la mobilisation fiscale en quémandant systématiquement l’aide budgétaire venant de l’étranger.
En dehors des influences possibles de ces aides sur la gestion de l’Etat, c’est tout le problème de la prévisibilité et la fiabilité dans la mise à disposition de ces fonds. Les problèmes de coordination, de planification, de spécialisation et de respect des programmes africains restent des points d’interrogations qui ne facilitent pas une pérennisation de cette solution. La résilience du budget de l’Etat avec ou sans apport étranger demeure le défi des Etats africains. Cela est d’autant plus compliqué que le principe qui sévit dans la mentalité de la plupart des gouvernants, avec ou sans démocratie, est que le gagnant des élections, ou déclaré comme tel, est aussi celui qui décide de tout.
Il est donc question de trouver des contre-pouvoirs institutionnels pour que les affectations et les arbitrages de la fiscalité puissent aller plus vers le sens de la redistribution à des fins de péréquations intelligentes entre les différents agents économiques et régions locales. La réalité est que ce sont souvent les élites puissantes qui contrôlent les affectations et les arbitrages sur les budgets (Di John, 2009 : 29). Un rôle plus accru des parlements africains, mais aussi du système judiciaire notamment dans la conformité des exécutions avec une cour constitutionnelle plus indépendante pourraient grandement apporter plus de transparence dans le processus d’arbitrage. Ceci ne peut que réduire les risques d’accaparement par des factions tribales ou militaires avec un système de patronage qui font que les affectations des budgets en provenance de la fiscalité n’ont pas été faites de manière optimale dans l’intérêt des agents économiques africains.
Il importe d’aller vers l’organisation d’une fiscalité responsable en révisant les conceptions et les approches sur la mobilisation de ressources internes en Afrique sans pour autant et systématiquement considérer l’entrepreneur, le secteur privé en général et le travailleur salarié comme la principale cible à ponctionner. Mais la crédibilité de l’Etat repose aussi sur les transferts des ressources issues de la fiscalité vers des réalisations visibles et utiles aux agents économiques.
En cela, l’approche du tout « mondialisation » adoptée par certains Etats risque d’être en contradiction avec la réalité des besoins et de la vulnérabilité des économies africaines (Keen & Mansour, 2008). En réalité, c’est toute la confusion qui fait que pour certains dirigeants l’Etat africain se confond avec le droit absolu de lever des taxes et d’en disposer sans contre-pouvoir qui est soulevée. C’est le fameux Etat-Taxe dont parlait l’économiste Schumpeter (Schumpeter, 1954). Un Etat qui n’utilise par la taxe comme moyen de régulation de l’activité économique mais uniquement comme moyen de ponction sur la production nationale et internationale est une anomalie économique. Il y a lieu d’y remédier tant au niveau national que dans les espaces décentralisés où fonctionne la fiscalité locale.
Mais le vrai défi reste l’élargissement de l’assiette fiscale en apportant une attention plus grande à l’évasion fiscale sous toutes ses formes dont les plus connues est la fuite des capitaux et des ressources financières de l’Afrique. Il y a lieu d’accorder de mieux s’organiser collectivement pour arrêter l’hémorragie de la fuite des capitaux et le manque à gagner que cela représente en termes de développement.
12. Recommandations : vers un Pacte de soutien au pouvoir d’achat et à la prospérité économique
Les recommandations devront provenir des agents économiques associés à cette réflexion fondatrice d’une « autre Afrique », ceux qui retrouvent la cohérence entre l’être et l’avoir et qui marginalisent le « paraître », ce palliatif économique qui permet de retarder l’avènement d’une prospérité économique partagée.
Toutefois, il importe de s’assurer que toutes propositions d’actions ou de recommandations puissent s’accompagner de l’identification, même sommaire, des responsabilités premières pour la mise en œuvre. Il est question d’éviter de faire une liste de vœux pieux. L’originalité dans cette démarche alternative est d’associer dès le départ, par le biais de l’approche du « bas vers le haut », les principaux agents économiques et groupes d’acteurs du développement suivants :
Les autorités africaines (AA), les bailleurs de fonds publics (BFP), les investisseurs étrangers directs (IED), le secteur privé africain (SPA), la Diaspora (D)), la société civile africaine (SCA), la société civile internationale (SCI), etc. Les mesures proposées doivent nécessairement s’inscrire dans un cadre précis et si possible lié à un espace géographique et éviter de servir d’antidotes à des approches palliatives rendant parfois l’Africain un acteur inconscient de la perpétuation de sa qualité de variable d’ajustement. Les trois grandes classifications suivantes sont proposées :
- Mesures d’urgence et de court terme (1 à 3 ans avec espace géographique)
- Mesure de moyen et long-terme (3-7 ans et 10-25 ans avec espace géographique)
- Mesures anti-palliatives (ou mesures anti-piège de la pauvreté).
Dans la mesure du possible, il y a lieu systématiquement de proposer les modalités opérationnelles de mises en œuvre sans verser dans le « Y a qu’a ». Aussi, des propositions sur des sources de financement plausibles et alternatives seraient appréciées sans nécessairement faire appel à la dite « communauté internationale », ni systématiquement à l’Etat sauf si ce dernier a une fonction de régulateur, d’accompagnateur et diffuseur du savoir, de la connaissance et des technologies et savoir-faire.
Le projet politique et économique est de faire évoluer les pays africains vers des économies intermédiaires d’ici 2025 et utiliser le nouveau rôle de l’Etat régulateur et le secteur privé responsable socialement dans un le Pacte de soutien au pouvoir d’achat, à la création de richesse et au développement de la prospérité économique.
Pour initier le débat, les mesures suivantes (listes non exhaustives) sont proposées :
11.1 Les mesures d’urgence et de court terme
[ X] AA [X] BFP IED [ ] [ ] D [ ] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [ ] D [ ] SCA [ ] SCI [X] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [ ] D [ ] SCA [ ] SCI [X] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [X] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [X] [ ] D [ ] SCA [ ] SCI [X] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X ] D [X] SCA [ ] SCI [X ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [ ] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X ] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X ] D [X] SCA [ ] SCI [X ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X ] D [X] SCA [ ] SCI [X ] SPA |
11.2 Les mesures de moyen et de long terme
[X] AA [X] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [X] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [X] SPA |
[X] AA [X] BFP IED [X] [X] D [X] SCA [X] SCI [X] SPA |
[X] AA [X] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [X] SPA |
[X] AA [X] BFP IED [X] [X] D [X] SCA [X] SCI [X] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [X] D [ ] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [X] BFP IED [X] [X] D [X] SCA [X] SCI [X] SPA |
[X] AA [X] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [ ] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [ ] D [ ] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [X] BFP IED [X] [X ] D [X ] SCA [X ] SCI [X ] SPA |
11.3 Mesures anti-palliatives
[X ] AA [X ] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X ] AA [X ] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X ] AA [X ] BFP IED [ ] [X] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [X] [X] D [X] SCA [ ] SCI [X ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [ ] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
[X] AA [ ] BFP IED [ ] [ ] D [X] SCA [ ] SCI [ ] SPA |
Les autorités africaines ne peuvent plus se cacher derrière la « souveraineté nationale » pour influencer l’économie et la finance. Le poids de plus en plus grandissant des sociétés transnationales adossées parfois à des Etats industrialisés ou émergents conduit les gouvernements africains à préférer le silence afin de faire des arbitrages en défaveur de leurs populations respectives. La résistance, la veille et l’anticipation ne peuvent prendre corps que dans des espaces de transparence et de précaution monétaires et financières. L’intégration régionale et l’harmonisation continentale monétaire et financière ne sont plus des alternatives mais bien des stratégies de survie.
Les réponses suggérées sont modulables et forment des sous-pactes qui doivent reposer sur des contre-pouvoirs. La cohérence de l’ensemble de ces actions suppose une intégration dans un Pacte africain de soutien au pouvoir d’achat et à la création de la prospérité économique (Amaïzo, 2009 : 35). Il s’agit d’un programme stratégique glissant afin de l’adapter tant sur le court-, le moyen- et le long-terme.
Les réponses suggérées sont modulables et forment des sous-pactes qui doivent reposer sur des contre-pouvoirs. La cohérence de l’ensemble de ces actions suppose une intégration dans un Pacte africain de soutien au pouvoir d’achat et à la création de la prospérité économique (Amaïzo, 2009 : 35). Il s’agit d’un programme stratégique glissant afin de l’adapter tant sur le court-, le moyen- et le long-terme.
Avec plus de 241 millions d’individus au chômage dans le monde en 2009[21] et face à environ 11 millions d’emplois sauvés par les mesures du G 20 (Graphique 8 ), la tâche est titanesque et passe par une refondation des modes de production et des visions économiques des Africains, si possible sans contradiction entre les citoyens-contribuables et les dirigeants. Si l’on rajoute les « chômage » dans le secteur informel africain mal répertorié, les nouveaux paradigmes africains en économie ne peuvent se permettre de mimer les approches consistant à faire de la croissance sans créer des emplois et des occupations productives.
L’Afrique doit retrouver les mécanismes d’anticipation afin de limiter les arbitrages stratégiques allant à l’encontre de ses propres intérêts. La montée continue d’une croissance économique forte ou résiliente sans création d’emplois décents en Afrique suggère des approches plus coopératives et coordonnées. L’augmentation du pouvoir d’achat aura pour objectif d’augmenter les dépenses des agents économiques notamment les ménages dans la proximité. C’est, probablement là, le moteur fondamental d’une économie qu’elle soit traditionnelle ou alternative.
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Notes :
[1] La crise financière en Islande, La crise financière online, voir <http://www.crise-financiere.com/crise-europe/crise-en-islande.htm>
[2] Il importe de noter le changement dans les positions chinoises par la voie du Premier ministre Wen Jiabao qui rappelle que la présence chinoise en Afrique ne repose pas uniquement sur la recherche effrénée de matières premières, mais doit permettre de renforcer les capacités intrinsèques des Africains à prendre en charge le développement de leur continent. Plus de 100 milliards de $US d’échanges en 2008 entre l’Afrique et la Chine témoignent de cette stratégie. Cela se traduit lors du 4e forum sur la coopération Chine-Afrique (FOCAC) le 8 novembre 2009 à Charm El-Cheikh en Egypte, par de nouveaux engagements sur l’augmentation des investissements en Afrique, l’augmentation de l’aide chinoise à l’Afrique, la réduction de la dette et l’ouverture ciblée du marché chinois aux produits africains, particulièrement non transformés. Néanmoins, la composition du personnel chinois et le non-retour de certains d’entre eux disposant, parfois de casier judiciaire fourni, risque de poser de graves problèmes de sécurité à terme en Afrique.
[3] Oxford Analytica (2008), “Africa: Economic growth is strong but constrained”, May 15.
[4] United Nations (2009), World Economic Situation and Prospects 2009, Montly Briefing No. 7, April 2, from <www.un.org/esa/policy/publications/wespmbn/sgnote_7.pdf> ; Ces estimations comprennent le fond de sauvetage financier y compris les garanties des Etats et une première estimation des dettes portant sur les actifs toxiques (créances irrécouvrables) ainsi que les injections de liquidité dans le système financier afin de mettre fin à la méfiance interbancaire.
[5] Interest rate contracts
[6] Blankfein, Lloyd (2009) “Do not destroy the essential Catalyst of risk”, in Financial Times, February 9, p. 7.
[7] Klapper, Bradley S. (2009), « US Fined over 295 millions $US over illegal subsidies to Cotton Growers”, in The Hugtington Post, August 31, 2009 and posted October 26, 2009 on <http://www.huffingtonpost.com/2009/08/31/us-fined-295-million-over_n_272844.html >
[8] WTO, Doha Ministerial Declaration, WT/MIN(01)/DEC/1, Nov. 20, 2001.
[9] Schnepf, Randy (2005), Background on the U.S.-Brazil WTO Cotton Subsidy Dispute, CRS Report for Congress, Code RL32571, July, 11, voir : < http://fpc.state.gov/documents/organization/57876.pdf>.
[10] Joseph Ki-Zerbo, Préface du livre Yves Ekoué Amaïzo (sous la coordination de), L’Afrique est-elle incapable de s’unir ? Lever l’intangibilité des frontières et opter pour un passeport commun, avec une préface de feu Prof. Joseph Ki-Zerbo, collection “interdépendance africaine”, éditions L’Harmattan, Paris, 2002, p. 36.
[11] Jean Ping les définit comme « un cercle restreint de quelques nations privilégiées, des grandes puissances, toujours gagnantes et arrogantes, toujours au-dessus de la morale et des lois, décidant seules et imposant unilatéralement leur volonté au reste du monde et singulièrement à l’Afrique sans même se soucier un tant soit peu, ni de ses intérêts, ni de ses problèmes, ni de ses réalités, ni de sa spécificité, ni des aspirations de ses populations ».
[12] En référence à la phrase célèbre Montesquieu «La servitude commence toujours par le sommeil », Yves Ekoué Amaïzo rappelle dans ce livre comment « la médiocrité et l’injustice sont alors promues au rang des principes fondateurs d’un Etat en voie de somnolence avancée quant il ne s’agit pas purement de chloroformer les véritables actions de développement, inscrites alors dans la partie en charge de l’amnésie des cerveaux des Africains », p. 18 (Amaïzo, 2002).
[13] Bloy E et Dupuy C. (1990), « Adaptation aux règles de gestion aux contraintes du financement informel : réflexion dans le cadre africain », in L‘Entreprenariat en Afrique francophone, Ed. AUPELF-UREF – John Libbey Eurotext, Paris, pp. 65 -75, accessible sur < http://www.bibliotheque.refer.org/livre14/l1405.pdf>
[14] Bernanke, Ben S. (2009), « Financial Regulation and Supervision after the Crisis: The Role of the Federal Reserve», Speech of Chairman Ben S. Bernanke, At the Federal Reserve Bank of Boston 54th Economic Conference, Chatham, Massachusetts, October 23, on: <http://www.federalreserve.gov/newsevents/speech/bernanke20091023a.htm>; Version originale en anglais : “A fundamental element of effective financial regulation is protecting consumers from unfair and deceptive practices. The recent crisis clearly illustrated the links between consumer protection and the safety and soundness of financial institutions”. He further suggested: “Strengthening consolidated supervision, setting up a mechanism (such as a systemic oversight council) to identify and monitor risks to financial stability, and creating a framework that allows for the safe unwinding of failing, systemically critical firms are among the essential ingredients of a new system that will reduce the probability of future crises and greatly mitigate the severity of any that occur”.
[15] Voir The 2009 Legatum Prosperity Index, les critères comprennent : les fondamentaux économiques, l’entrepreneuriat et l’innovation, les institutions démocratiques, l’éducation, la santé, la sécurité et la paix civile, la gouvernance, les libertés individuelles et le capital social ; www.properity.com.
[16] Roy Laishley, « Afrique : jouer fin pour tirer son épingle du jeu dans les échanges avec l’Asie », in Afrique Renouveau, ONU, www.un.org, p. 1, disponible sur : <http://www.un.org/french/ecosocdev/geninfo/afrec/newrelfr/economies-emergentes-09.html>
[17] Selon la BAD, la Tunisie, l’Egypte, le Kenya, l’Ouganda et l Tanzanie a été obligée de revoir à la hausse leurs offres (entre 25 et 200 points de base) pour attirer des investisseurs lorsque ce pays cherchaient à obtenir des prêts sur le marché financier (Kasekende, Ndikumana & Rajhi, 2009 : 5).
[18] Le taux d’imposition global des bénéfices des entreprises en Afrique subsaharienne était de 71,2 % ; voir World Bank (2007), World Development Indicators 2007, Washington, D. C., USA.es)
[19] Ce chiffre est de 0,2 % du PIB quand on inclue le Zimbabwe.
[20] Ce chiffre est de -6,3 % du PIB quand on inclue le Zimbabwe.
[21] ILO (2009), Presse release, 18 septembre 2009, No ILO/09/45, voir http://www.ilo.org/global/About_the_ILO/Media_and_public_information/Press_releases/lang–en/WCMS_113989/index.htm >. voir aussi ILO (2009), Protecting People, Protecting jobs, ILO, Geneva, Switzerland, September 2009, voir <http://www.ilo.org/public/libdoc/jobcrisis/download/protecting_people_promoting_jobs.pdf > ainsi que le rapport final des ministres des finances et banquiers centraux des vingt principales économies mondiales réunies à Saint Andrews, en Ecosse, 6 novembre 2009.
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AFP says
Tunisie: réunion africaine pour des réponses alternatives de l’Afrique
AFP 28.11.09 | 15h07
L’Afrique doit proposer des réponses à la crise financière mondiale non similaires à celles des pays développés, a indiqué samedi Yves Ekoué Amaïzo, expert en architecture financière. “Le Continent africain devra proposer des réponses qui ne sont pas nécessairement les mêmes que celles des riches pays industrialisés”, a-t-il précisé lors d’une réunion à Tunis de la Coalition pour le dialogue sur l’Afrique (CoDa). Lancée en mars 2009 à Addis-Abeba, la CoDa “offre une lecture alternative de l’économie dominante en privilégiant le point de vue des Africains sur les réponses à apporter aux conséquences en Afrique de la crise financière de 2008”, a ajouté M. Amaïzo. “Le paradigme de dépendance économique et financière dans lequel se réalisent en Afrique les opérations économiques, les transactions financières et les arbitrages stratégiques ne répond plus aux préoccupations des agents économiques africains”, a-t-il expliqué. L’Afrique qui “n’est ni coupable, ni responsable de la crise”, doit suggérer des réponses reposant sur “les contre-pouvoirs et passent par un acte de soutien au pouvoir d’achat et à la création de la prospérité économique”. Elle doit “retrouver les mécanismes d’anticipations afin de limiter les arbitrages stratégiques allant à l’encontre des ses propres intérêts”, a proposé M. Amaïzo. “Ces réponses ne proviennent pas des gouvernements ni des agences officielles mais de la société civile parce que dans le CoDa c’est la société civile qui parle”, a indiqué à l’AFP Donald Kaberuka, président de la Banque africaine de développement (BAD). La CoDa est une initiative conjointe de la BAD et de l’Union africaine et de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique visant à faciliter les débats sur le développement de l’Afrique et sur la manière de l’améliorer.
Agence de presse saoudienne says
Face à la crise, l”Afrique doit recourir aux “contre-pouvoirs”
Tunis, 28 nov 2009 (SPA) – Face à la crise financière mondiale, l”Afrique doit suggérer des réponses reposant sur “les contre-pouvoirs”, a proposé samedi l”expert togolais en architecture financière Yves Ekoué Amaïzo, lors d”une réunion à Tunis de la Coalition pour le dialogue sur l”Afrique (CoDa).
“Les réponses suggérées (…) reposent sur les contre-pouvoirs et passent par un pacte africain de soutien au pouvoir d”achat et à la création de la prospérité économique”, a-t-il ajouté.
L”Afrique, qui n”est “ni responsable ni coupable de la crise” devra “proposer des réponses qui ne sont pas nécessairement les mêmes que celles des riches pays industrialisés”, a dit Amaïzo.
La CoDa est une initiative conjointe de la BAD, de l”Union africaine et de la Commission économique des Nations unies pour l”Afrique visant à faciliter les débats sur le développement de l”Afrique et sur la manière de l”améliorer.
–SPA 20:22 LOCAL TIME 17:22 GMT
Kossi KOUDAHENOU says
De la nécessité de créer un pont de développement entre la diaspora et l’Afrique
Il est plus que temps de créer un pont de développement entre la diaspora africaine et leurs pays d’origine. La plupart des Etats africains en tant que tel ont jusqu’alors feint de reconnaître, ou pour être plus direct, ont tout simplement failli de reconnaître l’impact significatif des fonds transférés par la diaspora vers leurs pays d’origine, sur leur économie. L’évaluation de cet impact aidera les pays africains á mettre sur place une politique rationnelle de canalisation de ces fonds vers des secteurs de développement. Et c’est ce que j’appellerai “la création de pont de développement entre la diaspora et l’Afrique”. Chaque immigré á son niveau tient a cœur le bien-être de ses membres de famille restés au pays, et envoie régulièrement de l’argent pour les soutenir dans leurs besoins. Tantôt c’est de l’argent pour soutenir un oncle ou un cousin malade, tantôt c’est pour payer les frais de scolarité ou de formation d’un frère , ou tout simplement voler au secours d’une famille frappée par la famine. De façon générale, l’utilisation finale du fonds est plus que ponctuelle et systémique. On a beau gloser sur le montant total de ces transferts mais jamais sur leur utilisation exacte. Mais le constant est lá : aucun projet durable de développement ne bénéficie de ces fonds, faute de structures dignes de ce nom, capable de les orienter vers des secteurs qui produiront des fruits a grande échelle pour toute la société en général. Bon nombre des Etats africains, et plus particulièrement les Etats Subsahéliens basent leur développement sur les aides a recevoir des pays riches, ou du moins y accordent une importance relative. Pire encore, la nouvelle notion de “straightjacket” prônée et louée par les tenants de la globalisation, influence beaucoup nos dirigeants africains dans leur prise de décisions économiques. On tente de mettre en place et en désordre sans études préalables approfondies, des structures économiques et mesures fiscales ayant pour finalité d’attirer des fonds d’investissements étrangers. Mais les conditions économiques africaines, disons plutôt les réalités économiques et sociales africaines sont telles que l’application stricte des mesures prônées par la “globalisation” relève du surréalisme. Je ne veux pas rentrer ici en détails dans les effets ou bénéfices de la globalisation, de peur d’activer des polémiques inutiles, qui de loin ne sont pas le but visé de mon analyse. Au contraire ce que je veux souligner, c’est plutôt la nécessité de créer une politique économique capable d’attirer les fonds en provenance de la diaspora. La logique en voudrait ainsi puisque les transferts de fonds en provenance de la diaspora dépassent largement ces dernières années les aides reçues par les Etats africains des pays riches, si je me tiens aux dernières déclarations du Dr. Yves Ekoue Amaizo au cours du dernier forum de la CoDA.
L’actuelle crise financière doit nous ouvrir les yeux, et peut être exploitée positivement par toutes les composantes de la société africaine tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Si nous partons du simple constant que les transferts de fonds de la diaspora tendent a dépasser les capitaux étrangers reçus, et qu’à cause de la crise financière, ces capitaux étrangers décroîtront, nous pouvons toutefois conclure que dans un proche avenir, l’Afrique n’aura pour principal bailleur de fonds que la diaspora. Alors pourquoi ne pas mettre en place des mesures pour encourager cette diaspora à en faire davantage pour aider le continent a décoller? Il est un fait que l’africain a l’étranger a une connaissance très limitée sur les instruments financiers. En conséquence, il n’aime pas prendre des risques en investissant dans les marches financiers ou dans des activités pouvant lui générer de revenus substantiels mais a haut potentiel de risques. Résultat: bon nombre d’africains ont un fonds considérable dans leurs comptes bancaires et ne produisant rien comme intérêt. Ils en sont conscients et ne savent pas trop que faire. Le laveur d’assiettes à Paris, le laveur de voitures à New-York, l’ouvrier spécialisé à Milan ou encore la tresseuse de cheveux à Chicago ne sait que trop faire de ses épargnes, gagnées au fruit de dur labeur. Mais une chose est certaine: il est conscient que le dollar diminue en valeur, que l’Euro ne sera pas éternellement au même niveau, que l’argent qu’il a aujourd’hui dans son compte bancaire perdra de pouvoir á long-terme s’il ne génère rien comme intérêts. Mais que faire? C’est ici que les pays africains doivent proposer un contrat de “win-win” á la diaspora. Comme je l’avais dit plus haut, nous devons profiter de la crise financière actuelle, tant au niveau de la diaspora qu’au niveau des Etats. Les Etats africains doivent maintenant mettre en place des mesures incitatives pour pousser la diaspora à rapatrier beaucoup plus de fonds. Ces mesures doivent être assorties par des propositions concrètes de projets de développement à financer, et qui permettront á la diaspora de capitaliser sur son investissement, et aux Etats d’améliorer le bien-être général des populations. Dans une prochaine analyse, j’étalerai quelques mesures concrètes qui je crois, peuvent-être le point de départ d’une réflexion beaucoup plus approfondie.
Kossi KOUDAHENOU.