Pour parvenir à une “initiative concertée de co-développement dans le cadre d’une coopération contractualisée et décentralisée”, la diaspora africaine en Europe doit se voir proposer de nouveaux instruments, estime Yves Ekoué Amaïzo, consultant international et développement des affaires et directeur du groupe de réflexion Afrology, lors du Forum Africagora du 7 février 2008 à Paris (France). Pour lui, le processus de décentralisation étant encore à l’état embryonnaire dans les pays du Sud, il faut redéfinir la notion d’espace décentralisée ou de zone d’initiative de co-développement (Zic) en fonction d’initiatives concertées impliquant les diasporas économiques. De même, il préconise la création d’un “visa diaspora” attribué dans un cadre précis de conduite de projets.
Les Zic impliqueraient la signature de chartes interrégionales, intercommunales, interentreprises, inscrivant “les initiatives négociées et les projets de co-développement”. Les différents groupes d’acteurs “négocient pour définir les priorités pour une période donnée, mobilisent les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs, et peuvent ainsi juger de l’efficacité des actions menées et ajuster d’une période à l’autre leurs priorités”.
Le principe des Zic suppose une “contractualisation interne à un espace donné, entre les différents groupes d’acteurs, et externe, c’est-à-dire entre des acteurs et les pouvoirs publics”. Les actions initiées dans le cadre de cette nouvelle forme de développement doivent “s’inscrire dans des horizons temporels longs refondant l’importance des apprentissages et des échanges d’expériences”.
Un “visa diaspora” pour des projets de co-développement
Yves Amaïzo plaide en faveur d’un “visa diaspora” qui serait délivré “dans le cadre d’initiatives concertées et participatives d’appui au co-développement entre partenaires identifiés”. Le financement pourrait provenir des structures publiques décentralisées, des entreprises adeptes de la responsabilité sociale et d’un État incitateur. Le directeur d’Afrology imagine un dispositif législatif “pour uniformiser les modalités de financement des ‘initiatives concertées de co-développement’ en modulant entre 25% et 100% les bénéfices des sociétés qui auront réinvesti dans ces initiatives”.
L’instauration d’un visa diaspora permettrait de “consolider la rupture avec le paradigme ‘utilitariste’ des transferts financiers opérés par les travailleurs migrants ou expatriés vers des investissements de moyen et long terme, compléments indispensables à l’effort nécessaire de renforcement de la formation du capital fixe et d’une croissance économique partagée”, souligne Yves Amaïzo.
Aboutir à un statut d'”entreprises jumelées”
Le visa diaspora reposerait sur la “création d’unités et d’entreprises productives et commerciales en réseaux avec une contrepartie des pays du Nord”. Pour Yves Amaïzo, il s’agit de “refonder le dialogue avec le pays d’origine en créant une structure d’accueil permanente de la diaspora dans le pays de résidence des migrants sédentarisés, si possible au niveau des structures spécialisées dans l’entrepreneuriat et dirigée par un représentant du secteur privé élu sur une base rotative homme-femme”. Cette structure ne viendrait pas “s’opposer à celles existantes locales mais constituerait une entité spécialisée de la coopération décentralisée avec la diaspora”.
Le directeur d’Afrology plaide pour un “statut d’entreprise jumelée dans le cadre d’une initiative concertée de co-développement”, soit “la contractualisation d’activités communes à entreprendre par au moins quatre acteurs économiques du Nord et du Sud dont des représentants du monde de l’entreprise, des potentiels investisseurs, des représentants des institutions décentralisées et des représentants des institutions du gouvernement central. Le visa diaspora serait alors délivré conjointement par les deux entités décentralisées sur la base du projet ou programme de co-développement.”
Faire baisser le coût des transferts financiers
Yves Amaïzo propose notamment que des avantages spéciaux sur les transferts des biens intermédiaires pour la production soient promulgués “en guise d’incitation supplémentaire”. Il parle d’une information voire une formation de certains douaniers en Afrique, “peu scrupuleux du respect et des traités”, pour “éviter des coûts de transaction trop importants”. Il souhaite que soient également faites des propositions concrètes pour “faire baisser le coût des transferts financiers”.
“Dans un premier temps, il devrait être possible pour le patronat français et africain d’évaluer les avantages et inconvénients qu’il y a à obtenir un accord politique entre la France et les pays de la zone franc sur les transferts financiers utilisant le système de transfert électronique ‘IBAN’, opération qui permet des virements financiers ‘gratuits’ dans l’espace de l’Union européenne”, note Yves Amaïzo.
http://www.co-developpement.org/index.php?sv=32&aid=803