Questions sur l’actualité du 15 juin 2012
On apprend dans le dernier rapport de la Banque africaine de développement (BAD) portant sur les perspectives économiques de l’Afrique que plus de 700 milliards $US ne sont pas réinvestis en Afrique et sont littéralement détournés vers d’autres cieux. Considérés comme des actifs illégaux, il s’agit tout simplement de crimes économiques que les dirigeants, parfois directement impliqués, semblent considérer comme un détail dans les maux qui touchent le continent. Selon l’institut « Global Financial Integrity » spécialisé dans la criminalité économique, entre 854 à 1800 milliards de $US se seraient volatilisés d’Afrique entre 1970-2008.
Il importe de rappeler que l’aide publique au développement à l’Afrique subsaharienne en 2009 s’élevait à 44,5 milliards de $US contre un moyenne annuelle oscillant entre 47,5 et 100 milliards de $US par an qui disparaissent. Autrement dit, et les langues les plus fourchues n’ont pas hésité à s’en prévaloir, on vient voler l’argent de l’aide à l’Afrique en Afrique pour le lui rétrocéder au mieux, au pire en ne lui rétrocédant que la moitié. Ce raccourci n’est pas tout à fait exact, mais n’est pas entièrement faux. Sans une véritable coopération sans hypocrisie entre les pays africains sérieux, il n’est pas possible de stopper cette hémorragie. Il faut bien parler de pays sérieux car certains sont mêmes considérés comme des havres de promotion de ces activités opaques.
Pour que l’argent quitte l’Afrique pour aller ailleurs, c’est qu’il doit y avoir de vrais raisons de rentabilité, d’assurance de retrouver sa mise pour que ces fonds quittent l’Afrique. Les pays qui reçoivent ces fonds illégaux ne se plaignent pas. Sans une concertation multilatérale en attendant celle mondiale, cette hémorragie économique de l’Afrique n’est pas près de s’arrêter.
Les voleurs à cols blancs des fruits de la croissance africaine ont mis en place toute une architecture militaro-juridique complexe fondée sur des réseaux de solidarités et d’ésotérisme permettant l’imbrication de sociétés écrans, des fondations, des holdings et autres filiales qui se créent aussi vite qu’elles disparaissent, ce dans des paradis fiscaux. Lorsque la Banque mondiale recommande simplement de renforcer l’arsenal juridique comme un meilleur contrôle sur les registres de commerce et une meilleure information moralisatrice des prestataires de services juridiques, financiers ou administratifs, on peut se demander si cette institution n’est pas tout simplement dépassée, voire ferme les yeux sur ceux qui contrôlent et manipulent ces structures militaro-juridiques.
Alors face à de tels cambriolages de l’Afrique et les incantations sans impact du G8, voire du G20, on peut se demander si le Président de la Banque mondiale, Robert Zoellick, n’est pas un peu à côté de la plaque en proposant de stimuler la croissance en Afrique en « bancarisant les pauvres ». Il est vrai que 2,5 milliards de personnes dans le monde n’ont pas accès aux services financiers. L’idée du Président de la Banque mondiale n’est pas nouvelle car il s’agit, grâce à des possibilités de paiements par le téléphone portable, d’enregistrer la partie de la population africaine qui ne connait la croissance que de nom. La téléphonie mobile (mobile banking) apparaît comme une volonté de « botter en touche » en laissant croire que le seul fautif, c’est toujours le même pauvre africain.
Ce disque-là est rayé et la Banque mondiale ferait mieux de confier ce genre d’études aux spécialistes de la Diaspora afin d’avoir des résultats un peu plus sérieux sur les véritables détrousseurs de la richesse des Africains. YEA.
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