Questions sur l’actualité du 2 Avril 2012
Le coup d’Etat au Mali a été annoncé le 22 mars 2012 à Bamako. Il suffit de tirer en l’air pour terroriser la population, bloquer la radio et la télévision et des années d’efforts pour enraciner la démocratie au Mali partent en fumée.
Quelles que soient les raisons, à quatre semaines des prochaines élections, il faut croire que les militaires qui « traitent » le Président d’incompétent ont manqué d’intelligence. Ils ont assurément vu trop de films de « Zorro »… Alors Zorro est arrivé et on change la constitution pour se donner une légitimité.
Tout continue presque comme avant ! Pas d’armes pour mater la rébellion au Nord laquelle gagne des positions dans la confusion générale. Pas d’améliorations de la pauvreté suite à un coup d’Etat ! Il y a malgré tout une réprobation importante de la majorité de la population malienne et des communautés africaine et internationale !
Impasse politique, disparition d’Amadou Toumani Touré du palais présidentiel de Koulouba puis réapparition quelque part dans Bamako. Il suffit de quelques sous-officiers mal-nourris, mal-éduqués, ayant de sérieuses difficultés à relire les textes de déclaration pour déconstruire le travail patient de construction de la démocratie malienne. Alors on a beau nous dire qu’il s’agit là d’une opération de revendication catégorielle qui a mal tourné, cela n’est pas intelligent ! Mais qui sont-ils ces « militaires » qui n’ont rien compris à la légitimité républicaine où l’armée est au service des civils et non le contraire. Malgré la réprobation de la communauté internationale, la France qui est entrée rapidement en contact avec le capitaine Amadou Haya Sanogo, chef visible de la junte putschiste, se contente mollement de ne pas intervenir.
Le droit d’ingérence a subi la maladie d’Alzeimer par intermittence. Ce ne fut pourtant pas le cas en Côte d’Ivoire ou en Libye. Il y a comme un consentement tacite de la communauté internationale pour « humilier et lâcher » ATT, un arrière-goût d’une opération punitive pour celui qui n’a pas toujours cédé à la France. Regardons les choses en face. Des soldats de second rang peuvent, sur la base d’un mécontentement, certes justifié, changer le cours des évènements au Mali. Faire un coup d’Etat, ce n’est pas gouverner. Qui se cache derrière tout ceci ?
Il suffisait pourtant d’attendre quatre semaines pour que le Président ATT tire sa révérence annoncée de longue date. En fait, ces militaires, avec un consentement tacite extérieur, aiment humilier. Ils ont trop insisté sur « l’incompétence » d’ATT parce que ce dernier aurait fait subir une humiliation à l’armée malienne dans la guerre territoriale au nord du Mali en ne mettant pas les meilleurs équipements de riposte militaire à disposition. La rébellion progresse pourtant, et les putschistes ne sont pas en train de les repousser.
Mais, n’est-ce pas aussi la maladie des dirigeants africains de ne plus être capables d’écouter les doléances des « petits militaires », ceux d’en bas qui sont censés être sous contrôle des généraux et autres colonels ? Ils sont où d’ailleurs ces généraux maliens ? Cachés disent certains, poltrons disent d’autres ! Ils attendent de voir la tournure de ce putsch militaire avant de s’aligner sur les positions du plus fort. Et l’éthique dans tout ceci ? Cette instabilité pourrait d’ailleurs avoir un impact négatif sur les populations déplacées alors que de nombreux pays scandinaves ont déjà commencé à budgétiser des sommes importantes pour une famine qui s’annonce dans le nord du Mali. Ce n’est pas la Croix-rouge malienne qui démentira. Qu’est-ce qu’ils ont ces militaires à s’en prendre à l’autorité d’un Etat pauvre et démocratique ?
Rappelons que le premier coup d’Etat en Afrique a eu lieu au Togo en 1963 avec l’assassinat du 1er Président Sylvanus Olympio. Celui-ci aurait commis l’erreur de ne pas prendre en considération immédiatement les revendications formulées par les sous-officiers souvent régulièrement humiliés et frustrés. Plus récemment, l’arrivée du Capitaine Dadis Camara (aujourd’hui déchu et en convalescence au Burkina-Faso) à la tête de la Guinée n’est pas très différente sauf que cela s’est accompagné de crimes et viols par des militaires guinéens restés impunis à ce jour. Le putsch militaire est donc le privilège de celui qui a la force et peut faire « sauter » l’autorité de l’Etat en y substituant l’aventure et les incertitudes.
Il est vrai qu’au Niger voisin, il faut bien parler d’un Coup d’Etat libérateur. C’est donc au Peuple malien, une majorité silencieuse de revendiquer par des manifestations leur droit à des élections libres sans la pression militaire. YEA.
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